Le Terrorisme pastoral

Le Terrorisme pastoral

La fin d'un monde ? Temporel et Spirituel le Chaos !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Macron - Bergoglio : un discours unique

 

 

 

 

 

 

Ce tire est osé , impertinent, scandaleux. Je le maintiens.

 

Attila et Tamerlan, massacraient, pillaient, violaient. Leur empire fut éphémère et ne leur survécu pas. Attila épargna Lutèce avant sa défaite dans les Champs Catalauniques.

 

C'étaient des barbares ! Ils ravageaient des régions entières mais ils n'atteignaient pas l'âme des peuples. Ils étaient fascinés par l'or et la puissance invincibles de leurs propres armées. Ils ne cherchaient pas à créer un homme nouveau. Ils n'étaient pas les chantres d'un monde à inventer. Ils n'avaient pas reçu en héritage la Grèce et Rome. Leurs empires avaient des frontières mesurées par les pas de leurs chevaux.

 

Macron est l'homme de la tabula rasa.Nous laissons aux savants le soin de disserter sur la décivilisation de Renaud Camus comparée à celle de Norbert Elias.

En 2017 , Macron a déclaré « la culture française n'existe pas ».

 

En octobre 2018 au 17ème Sommet de la francophonie à Erevan, un commentateur précise «  que le président de la République a défendu une vision plurielle de la langue française « trop institutionnelle », il plaide pour « sa réinvention. »

 

« L’épicentre de la langue française est sans doute dans le bassin du fleuve Congo », a ainsi répété le président français Emmanuel Macron. Pourtant la nomination de Louise Mushikiwabo a suscité de nombreuses critiques pour des raisons autant morales que strictement linguistiques. Le Rwanda où l’anglais a pris le pas sur le français, fait désormais figure de terre de reconquête et les atteintes aux libertés y sont constantes. Mais le plurilinguisme n’est pas contraire à la défense du français, estime Emmanuel. Macron. C’est même le « combat fondamental pour notre langue », a-t-il répété.

Soulignant les reproches parfois faits à « une francophonie trop institutionnelle », il l’a appelée à se « réinventer » afin de prouver qu’elle n’est pas « un espace fatigué mais un lieu de reconquête, notamment contre l’oppression faite aux femmes ».

« Le premier combat de la francophonie, c’est la jeunesse et tout particulièrement en Afrique », a ajouté le président français soutenu par ses homologues nigérien et centrafricain. ( Nouvelle République).

Le 24 mai, 2023 le même Macron, déclare que nous sommes dans un processus de « décivilisation »..;un commentateur y voit « un concept malléable à souhait ».

 

Depuis plusieurs décades la « décivilisation » est permanente. On ne peut en accabler le seul Macron.

Depuis que l'on assassine les enfants à naître et que l'on euthanasie les malades et les vieillards on a changé de civilisation !

Avec l'augmentation et les exigences de la religion islamique en France on a changé de religion. Et il est stupéfiant que la république qui se fait une gloire de la séparation des pouvoir religieux et politique, installe une religion qui a pour fondement un pouvoir religieux qui est un pouvoir politique !

Quant à l'épicentre de la langue française il n'est plus à l'Académie Française ! Il est dans la confusion des genres et la réécriture des ouvrage pour satisfaire les gauleiters de la pensée.

La liste serait très longue des preuves : du wokisme à l'éducation sexuelle dès l'école maternelle, de Pap Ndiaye à Macron en passant par Verant, jamais la France n'a connu une pareille inversion, ou une pareille dénaturation de la nature humaine, de l'être humain en soi .

Mais la promesse originelle vos eritis sicut diis.... est celle d'aujourdh'ui, Vous serez comme des dieux. Demain on rase gratis. Le discours de Macron à Marseille est un morceau d'anthologie quatre jours avant les émeutes ! Des mesures techniques pour guérir une crise de civilisation ! Il faut dire que la civilisation et MACRON c'est incompatible !

 

L'abandon en politique de toute métaphysique conduit au néant, le refus de l'être que l'on soit président de la république ou pape par détournement des règles du conclave conduit à la barbarie.

 

Le pape procède de cette même erreur lorsqu'il dénonce une utilisation idéologique de l'autorisation de la messe de Saint Pie V par les traditionalistes et qu'il invente un péché inconnu depuis deux mille ans, l'indiétrisme pour justifier l'interdiction de la messe dite selon le missel de Jean XXIII. Il y a là une pure invention – digne d'une dictature totalitaire- pour éliminer les opposants à une grande réforme bien plus radicale que celle de Luther... puisqu'elle vient de celui qui dit avoir été élu au dernier consistoire alors qu'il a été choisi sur un programme qu'il est tenu d'appliquer ! Ce qui a été formellement interdit par Jean-Paul II. ( voir notre blog sur cette VERITE!)

 

Mais celui qui a écarté de sa fonction le titre de Vicaire du Christ prétend maintenant changer le gouvernement hiérarchique de l'Eglise par un régime local et universel de synode copie de celui qui a conduit en France à la révolution de 1789, … les cahiers de doléances fabriqués à l'initiative des loges maçonniques. On voit déjà les résultats des synodes paroissiaux, diocésains et nationaux. Cette révolution est accompagnée de visites domiciliaires d'évêques réfractaires pour effrayer le marais des pleutres !

 

Macron - Bergoglio même combat : ils ont déclaré une guerre universelle à tout être humain et au Créateur ! Ils ont une « conception fantasmée de l'homme » ( Michel Geoffroy) : l'un par sa croyance aux règles technocratiques mondialisées de gestion de l'humanité ; l'autre par une croyance en une fraternité universelle à laquelle les francs maçons n'ont jamais cru mais qu'ils savent organiser.

La vision de Macron est la même que celle de Bergoglio . Seuls les mots changent.

Avec l'arrivée du cardinal Bergoglio les hérauts du changement sont arrivés au premier plan. Un article complet sur ce sujet est paru le 12 novembre 2014 sous le titre Rahner et Congar caracolent de nouveau (Rahner y Congar cabalgan de nuevo), de Jésus Garmilla. Cher lecteurs, pas la peine d'interroger vos informateurs, ils n'en n'ont jamais entendu parler. Ils ne savent rien mais ils font croire qu'ils savent.

 

 

 

Avec Congar « le mot réforme est devenu un véritable lieu théologique depuis la proclamation de François comme pape ». Et de citer «  Vraie et fausse réforme dans l'Eglise » (édité en espagnol par les jésuites de Sigueme) et « Pour une Eglise servante et pauvre ». Rahner a fait aussi très fort avec Changement structurel de l'Eglise.

Jesus Garmilla qui connaît bien ses classiques rapporte cela à Iglesia semper reformada, au dialogue oecuménique et à l'aggionamento de Jean XXIII.

 

 

 

Rahner avait averti que si l'Eglise ne se soumettait pas à un changement structurel, elle deviendrait un ghetto ou une secte. La dernière réunion à Rome pour la fraternité universelle confirme ce jugement paru en 1974. Evidemment nos évêques sont ailleurs !

 

 

 

Une dernière nouvelle qui date d'aujourd'hui confirme ce grand bon en avant.

 

 

Victor Manuel Fernandez (VMF) vient d'être nommé à la tête du dicastère pour la doctrine de la foi en remplacement du jésuite Ladaria. Ce dernier qui a montré une vive réaction au laxisme ambiant . Selon INFOVATICANA du 23 mai : Le cardinal Ladaria « a défendu Humanae vitae contre l'idéologie du genre et le transhumanisme ».

VMF a été le principal rédacteur des conclusions de la conférence du CELAM à Aparecida en 2007. Cette réunion de l'épiscopat latino-américain est connue pour avoir annoncé de programme de la nouvelle Eglise.

Voici dans notre traduction les conclusions d'Aparecida par le cardinal Bergoglio.

 

 

Le pape François n’aurait pas dû être un inconnu car il avait annoncé son programme après la Vème Assemblée du CELAM à Aparecida en 2007. Tout est contenu dans son discours de clôture du 19 janvier 2008, y compris le rôle que doit jouer l’Eglise d’Amérique Latine pour changer l’Eglise de Rome. C’est un monument totalement ignoré de l’histoire de l’Eglise.

 

 

 

 

 

 

« La religion populaire comme inculturation de la foi dans l’Esprit d’APARECIDA.

 

 

 

« La V Conférence CELAM s’est tenue en mai dans le sanctuaire brésilien de

Aparecia. Ce fut un événement ecclésial. Un regard aigu sur la réalité

Latino-américaine qui exigeait que l'Église remplisse sa mission d'évangélisatrice.

Ce n’est pas quelque chose de nouveau que l’Eglise propose comme objectif l’évangélisation, il existe une impulsion originelle et fondatrice du christianisme pour annoncer le salut à tous les peuples (Mt 28, 19).

Mais le besoin urgent de mission que propose Aparecida parle de la

perception d’une érosion du catholicisme latino-américain. Pendant plus de

cinq cents ans, la foi chrétienne a pénétré la culture du continent et a offert une

religiosité qui nourrit la vie personnelle et nos peuples lorsqu'elle est accueillie avec

sincérité. Cependant, bien que les catholiques soient encore majoritaires, quelque chose est en train de changer. Le pape Benoît XVI a déclaré au début de la conférence: «  on perçoit un certain affaiblissement (…)de la vie chrétienne dans la société dans son ensemble et dans l’appartenance à l'Église Catholique en raison du sécularisme, de l'hédonisme, de l'indifférentisme et du prosélytisme des nombreuses sectes, des religions animistes et des nouvelles expressions pseudo-religieuses ».

 

Nous sommes dans une nouvelle ère, avec des changements profonds et accélérés. Cette réalité génère l’incertitude, la confusion et la peur dans le cœur des hommes et des femmes de notre temps. Dans le contexte latino-américain et caribéen, cela devient plus complexe et dramatique parce que nos peuples vivent une réalité où la pauvreté et l'exclusion augmentent, la corruption institutionnalisée prend racine, les violences de toutes sortes se propagent et se développent à mesure que la perte d’identité augmente.

 

Cette situation a engendré des changements vus par le Concile Vatican II

(GS 4-10) il y a quarante ans. Ces transformations se sont aggravées et le changement d’époque exige une nouvelle façon de nous situer dans l'histoire qui a changé et continuera de changer. Des choses dont nous pensions qu’elles ne se produiraient jamais ou que nous pensions ne pas voir de notre vivant, nous les vivons et l'avenir est incertain pour nous.

Les phénomènes survenus dans la post-modernité, les effets de la globalisation et tant d'autres, nous ne pouvons pas les évacuer en pensant qu’il s’agit d’une crise temporaire et que nous devons attendre que ça se passe pour que tout revienne comme avant. L'irréversibilité de la globalisation - si injuste à bien des égards – a une dimension positive « en tant qu’elle tisse des relations au niveau planétaire comme une réussite de la grande famille humaine et un signe de sa profonde aspiration à l'unité »(Benoît XVI, discours inaugural, 2).

C'est aussi une nouvelle occasion pour l'évangélisation d'atteindre l'ensemble du monde et pour que l’Eglise puisse travailler à l’unité des continents et entre les peuples pour rendre la collaboration et la crédibilité des chrétiens plus efficaces.

 

 

 

La forte conviction de la Conférence est que le chrétien ne peut pas ne pas être missionnaire et, que d'autre part, cette exigence ne puisse être vécue en profondeur et en vérité sans l’attitude du disciple : une rencontre personnelle et communautaire avec Jésus-Christ . Les Chrétiens que nous sommes sont disciples du Maître et donc nous ne pouvons pas regarder la réalité, sinon en termes de mission.

 

Nous ne sommes pas des observateurs impartiaux, mais des hommes et des femmes désireux de pénétrer toutes les structures de la société d'un amour que nous avons connu et qui dans la rencontre avec la réalité, est capable de la transformer en vie abondante.

Le pape dans son discours inaugural a déclaré que c'était «la meilleure chose qui nous soit arrivée dans la vie " et " que c’est ce que nous avons à offrir au monde pour combattre la culture de mort avec la culture chrétienne de solidarité, c’est un impératif qui nous touche tous. "(480) 

De manière concrète, avec une ouverture critique, sage et prophétique, avec une identité et avec discernement, l'Église en Amérique latine et dans les Caraïbes veut se mettre dans un état de "Disciple missionnaire", pour "donner vie à nos peuples", dans le Christ.

Le propre du disciple est le discernement : le « regard humble», l’écoute attentive. Le disciple ne sait pas, ni ce qu'il doit faire car il n’est pas un Maître. Il écoute et n’a pas de réponse. C'est cela l'Eglise d'Aparecida : une communauté de disciples missionnaires qui veulent écouter le Seigneur. L'écoute du Seigneur

cela se fait aussi en écoutant la réalité avec un esprit humble pour discerner ce qui est, ce qu’il y a à faire et le faire.

L'Amérique latine connaît, comme le reste du monde, une transformation

culturelle ; "La V Conférence cherche à établir des critères sur la façon d'évangéliser la culture, et sur la façon dont la Bonne Nouvelle peut être transmise à la population à partir de la culture de chaque peuple". (Cardinal Paul Poupard).

 

LE CHEMIN DEJA PARCOURU

 

Quand nous considérons la réalité de l'évangélisation en Amérique latine aujourd'hui,

il nous est impossible de le faire sans tenir compte de certains termes tels que: culture, inculturation, religiosité populaire, piété populaire. Cependant, les réalités

cachées derrière chacun de ces mots ont été étudiées, analysées, mais,

elles sont surtout aujourd'hui le résultat d'une expérience accumulée à travers l'histoire; et l'histoire elle-même, avec ses fluctuations constantes, a déterminé son sens et la place qu’elles occupent.

Dans le document final de la V Conférence, le mot culture apparaît environ 70

fois, et cela diffère totalement de ce qui était compris lors de la tenue de la première assemblée de l'épiscopat latino-américain dans la décennie des années 50.

Aussi la réalité de la religiosité populaire a une incidence et une résonance positive qui diffère grandement de ce qui pouvait être perçu lorsque ce même terme est apparu dans les premiers écrits de l'Église latino-américaine.

 

 

 

 

Nous ne pouvons pas parvenir à une compréhension complète si nous ne les lisons pas à la lumière de l’histoire qui les forge, leur donne la dimension qu’ils ont aujourd’hui. On ne peut pas comprendre l'évolution de l'Église latino-américaine sans tenir compte des changements sociaux et politiques qui se sont produits à partir des années soixante.

À la fin du Concile de Trente en 1563, l'Amérique avait déjà reçu des centaines de

missionnaires ; on assistait à la grande controverse soulevée par Bartolomé de las Casas sur les méthodes d'évangélisation et de conversion ; il y avait une trentaine de diocèses et on avait tenu plusieurs conseils locaux et provinciaux pour discuter du projet missionnaire américain. Ces quatre siècles ont été fermés par Vatican II.

 La diversité des situations et des cultures dans lesquelles vivaient les différentes Églises, telles que les chrétientés européennes paralysées, les Églises orientales, les communautés en Inde, au Japon et en Chine, les jeunes églises en Afrique et les catholicismes populaires en Amérique latine entre autres, a été mise en évidence.

 

Pour la première fois, ces thèmes sont entrés «par la grande porte » et ont donné à nos Eglises particulières une nouvelle lumière pour faire face à des problèmes anciens et entamer un dialogue culturel, en nous-mêmes et avec l'extérieur. " Avec prudence et amour, à travers le dialogue et la collaboration avec les adeptes d'autres religions, toujours témoins de la foi et de la vie chrétienne, reconnaître, maintenir et développer des biens spirituels et moraux, ainsi que les valeurs socioculturelles qui s'y trouvent » (Nostra Aetate 2 ).

Ailleurs, Vatican II redécouvre l'importance des charismes à l’intérieur de l'Église (Lumen Gentium, 12), et exhorte également à discerner les signes des temps

(Gaudium et Spes, 4; 11; 44). Le Concile représente une ouverture au dialogue avec la monde contemporain, une certaine réconciliation avec une modernité éclairée et une récupération de la dimension prophétique de l'Église envers la société. Avec cette lumière que le Concile a apporté, il est possible de comprendre ce que l'Église

en Amérique Latine, a réussi et vécu au cours des dernières décennies.

 

 

  1. Medellin

 

Malgré tout on doit présenter un éventail des problèmes, la pauvreté et la nécessité de liberté qui ont été ceux qui ont attiré l'attention de l'Amérique latine et des Caraïbes dans l’après Concile.

La révolution cubaine de Fidel Castro, la tentative de mise en œuvre du développement, les mouvements sociaux populaires au Pérou, au Chili, en Bolivie, au Mexique commencèrent à changer le panorama de l'Amérique latine à la suite de la tentative manquée de "Che" Guevara d'étendre la révolution à toute l'Amérique latine à partir de la Bolivie. Tel est le contexte dans lequel a été célébrée en 1968 la II Conférence des évêques d'Amérique latine. Medellín n'était pas seulement une application du Concile à l'Amérique latine, mais une relecture créative de Vatican II à partir d'un monde de pauvreté injuste, avec des structures économiques et sociales de péché. L'Église en Amérique

Latine commença à essayer de comprendre et de découvrir sa mission à partir du cri de ses pauvres, la souffrance du peuple, des peuples autochtones, des femmes, des travailleurs, des paysans, des enfants.

Bien que la question culturelle n'ait jamais été abordée directement à Medellín, toutes les réflexions étaient teintées de la couleur que la réalité sociale donnait à la culture.

La II Conférence de l’épiscopat latino-américain a opté en faveur de l’énorme masse des déshérités de ce continent et a investi une grande partie de ses énergies dans la constitution d’une «Eglise qui née du peuple», un lieu de rencontre des plus pauvres pour l’écoute et la compréhension de la parole de Dieu à la lumière de la conscience de la réalité de tous les jours.

C’est grâce à l’option pour les plus pauvres que des églises particulières sont arrivées à un contact plus direct avec la réalité religieuse et culturelle à multiples facettes de ce continent. A donner aux pauvres la possibilité de prendre leur place et de prendre la parole, on a redécouvert une église cachée, composée pour mémoire de plus de 2600 peuples autochtones, avec leurs innombrables langues et traditions, plus deux millions de descendants d'Africains. Il était inévitable que les expressions culturelles de ces énormes segments de la population ne soient pas introduits dans les liturgies.

Medellín a été si important pour l'Amérique latine et même pour l'Église universelle,

qu'en 1974, le président du CELAM , Eduardo Pironio, s'est rendu à Rome pour la

Synode sur l'évangélisation, il apportait trois suggestions pastorales qui eurent une

influence plus tard sur la célèbre exhortation apostolique de Paul VI, "Evangelii

Nuntiandi ". Les trois suggestions étaient les suivantes : les communautés ecclésiales de base, le thème de la libération et la religiosité populaire.

 

  1. Puebla

 

La conférence de Puebla se trouva entraînée dans le bouillonnement du processus de "restitution de la parole » aux pauvres. Les communautés ecclésiales de base et les mouvements populaires de libération, considéraient que seul un changement social assumé par les masses était possible et que cela impliquait parler leur langage. Cette conception, avec ses lumières et ses ombres, a contribué à la rencontre de l'Église avec les cultures indigènes autochtones et celles afro-américaines d'une manière plus explicite.

À Puebla, la question culturelle est entrée par la porte de la religiosité populaire et a investi les thèmes traités à l'occasion des commémorations des 500 ans qui ont culminé à Santo Domingo. Puebla est largement consacré à la réflexion sur la religiosité populaire. Mais sa réussite fut seulement de voir une telle religiosité comme une réalisation imparfaite du « substrat catholique radical » de ce continent.

Depuis 1989, le panorama social et ecclésial change beaucoup. Avec la chute du socialisme à l’Est, le néolibéralisme est présenté comme la seule voie de salut, l’émergence du courant culturel de la postmodernité marque un changement d'horizon de la conscience sociale et ecclésiale d'Amérique latine.

 

 

 

 

  1. Saint-Domingue

 

La IVe Conférence des évêques d'Amérique latine se tint à Saint-Domingue

en 1992. On s’interroge sur la marche de l'Église en Amérique latine. Le défi d'inculturer l 'Evangile dans la société permet aux laïcs de réduire leur champ d'action intra-ecclésial, en les exhortant à «pénétrer les environnements socioculturels et d’en faire les protagonistes de la transformation de la société à la lumière de l'Évangile ». Les laïcs doivent cesser d'être des "chrétiens de sacristie" dans chacune de leurs paroisses et doivent assumer leur engagement à développer les politiques, l'économie, le travail, la culture et l'environnement.

Dans cette toile de fond, cependant, les conditions d’une vision moins étroite de la réalité des cultures latino-américaines s’établissent. On discute "L’Unité et la pluralité des cultures indigènes, afro-américaines et métisses" et on fait un pas dans cette direction en reconnaissant notre "continent multiethnique et multiculturel", avec une "vision du monde de chaque peuple""qui recherchent cependant d’une unité à partir de l’identité catholique » (SD 244) . En conséquence, la pluralité culturelle et sociale est toujours acceptée ce qui n'implique pas une pluralité religieuse.

 

Les conclusions de Santo Domingo découvrent une plaie qui reste ouverte dans les relations entre les églises chrétiennes et les traditions ancestrales des peuples américains : la recherche et la préservation de "l'identité catholique" semblent entrer conflit avec le défi du dialogue œcuménique et du dialogue interreligieux.  La commission 26, qui se réunit tout au long de la rencontre, affirme que « l’action ininterrompue de Dieu à travers son Esprit, dans toutes les cultures » ( 225-1), signifie que l'inculturation est  « un processus développé à partir l’intérieur de chaque peuple et communauté »(225-1). Dans la version définitive du document, il est admis de "promouvoir une inculturation de la liturgie, accueillant avec satisfaction ses symboles, rites et expressions religieux compatibles avec un sens clair de la foi, en maintenant la valeur des symboles universels et en harmonie avec la discipline générale de l'Église ».

 

 

 

LA CULTURE À APARECIDA

 

 

 

Il ne fait aucun doute que la nouvelle approche de la réalité latino-américaine utilisée

à Aparecida, a privilégié le concept de culture comme clé d'interprétation importante. Une approche très variée du sujet a été faite mais aucune définition concise du terme n'apparaît, mais nous trouvons certaines caractéristiques particulières de ce concept, déterminé par la lecture qui a été faite de la réalité.

[…] Au milieu de la réalité du changement culturel, de nouveaux sujets émergent, avec de nouveaux modes de vie, de nouvelles façons de penser, de ressentir, de percevoir et de nouvelles formes de relations. Ce sont des producteurs et des acteurs de la nouvelle culture » ( 51).

 

C'est un concept dynamique qui implique de parler des sujets, qui produisent

et qui agissent sur les façons de se comporter et les représentations et marquent ce qui les entoure. Ce type de connexion provoque un changement constant dans la société. Les

éléments produits dans la culture se contamine les uns les autres, développant ainsi de nouvelles formes d'expression et de décision chez les individus.

 

Aparecida souligne que le phénomène social se manifeste avec une grande

complexité. Il y a des situations qui sont reconnues comme indignes de l'être humain, et il faut découvrir comment le christianisme interagit face à ce phénomène. L'Église n'est plus conçue en dehors de la production de sens, mais comme l'un des acteurs de ce processus. Elle n'est pas située à partir d’une position critique, mais en tant que participant actif à ce détermine la configuration des espaces collectifs. Ce positionnement évite la tentation pour l'Église d’être considérée comme une réalité hors de la société et de ses contradictions. L'Église est productrice de culture, c'est-à-dire de comportement humain et promoteur de processus. Il n'est qu'une partie du large spectre, elle n'est pas le seul acteur. La capacité de son influence est mise à l'épreuve par le défi de convaincre aujourd'hui de la possibilité du projet chrétien, comme un projet qui réalise pleinement l'homme et l'histoire concrète dans laquelle il se développe chaque jour.

L'un des tréfonds d'Aparecida est la conscience de la responsabilité que nous devons montrer : la Bonne Nouvelle de Jésus est un moyen efficace de salut. Cela implique comme contrepartie la nécessité de découvrir et de reconnaître le rôle qu'a joué et doit jouer l'Église face aux réalités douloureuses et injustes qui affectent une grande partie de la société. Aparecida a trouvé un divorce entre la foi et la pratique sociale concrète des croyants, malgré le fait que de nombreux croyants aient pris d’importantes options de solidarité d’envergure. C'est au monde laïc d’avoir la tâche principale de témoigner de la présence de Dieu dans l'engagement de transformer les structures sociales.

«La cupidité du marché ne contrôle pas le désir des enfants, des jeunes et des adultes. La la publicité mène de façon illusoire à des mondes lointains et merveilleux, où tout ce que je souhaite peut être satisfait par des produits qui ont un effet efficace, éphémère et même messianique. On légitime que les désirs deviennent bonheur. Seul, ce qui est le nécessaire immédiat, le bonheur, doit être atteint grâce au bien-être économique et la satisfaction hédoniste. " (DA 50).

La cause fondamentale de cette rupture est une perception de la réalité liée

absolument avec une satisfaction particulière. Ceci est certainement encouragé par les communications sociales lorsqu'elles sont gérées selon les exigences du marché. La conception du bonheur comme la satisfaction du désir est placée au centre des besoins humains. Ce n'est rien de plus que l'autoréférentialité d'un narcissisme de base. Cela s’oppose frontalement aux diverses situations de marginalisation et de souffrance qui se produisent sur le continent. Les nouvelles générations, grandissant dans la logique de l'individualisme pragmatique et de « l'égomaniaque », sont les plus touchés par ces changements. Pour eux, le passé n'est pas une chose manquée et l'avenir est incertain. Atteindre un maximum de satisfaction est la référence de la réalité actuelle leur permet d'oublier momentanément les grands conflits et les souffrances de l’insécurité. On vit dans un monde où les conditions de la plus grande abondance ont permis de générer un système de comportement social insouciant.

Cependant, la racine de cette indifférence à la vie sociale se trouve marquée par la puissance de la désillusion à laquelle il faut ajouter le phénomène de

 

 

 

la mondialisation, en particulier dans son aspect économique, qui touche tous les secteurs et met en danger les moyens de subsistance de nombreuses personnes et, en même temps, ouvre à l’influence de nouveaux usages et coutumes qui génèrent des idées syncrétiques et des comportements ambigus, qui se heurtent aux façons de voir et de ressentir des personnes qui ont grandi dans un contexte culturel différent. Ces chocs ont structuré la nouvelle la société, qui a fait du changement une réalité permanente.

Tout cela nous aide à comprendre que la vie ecclésiale est confrontée à une

une série de défis importants, devant lesquels le document fait le choix d’une vie de foi, et

où la richesse humaine de la proposition évangélique doit être mise en évidence. La communauté de foi – qui lie les personnes d’une manière nouvelle et qui par là même se convertit en espace contre-culturel – s’oppose à une conception de la vie sociale qui met en son centre, la consommation comme chemin sûr et assuré pour l’accès au bonheur. Depuis longtemps nous assistons à une sorte de « colonisation culturelle par l’imposition de cultures artificielles qui déprécient les cultures locales et cherchent à imposer une culture homogénéisée qui conduit à l’indifférence de l’autre, à celui dont on a pas besoin et envers lequel on a aucune responsabilité (DA 46) . L’affirmation exacerbée des droits individuels et subjectifs est accompagnée d’un côté par l’absence de travail responsable pour les droits sociaux et culturels solidaires et de l’autre elle conduit à l’effacement de la dignité de tous spécialement celle des plus pauvres et des plus nécessiteux.  Dans cette situation culturelle, le plus grand défi est dans un dialogue empathique avec les différentes composantes de la culture afin qu'elle devienne un véhicule efficace pour se rapprocher de Jésus.  Le manque de réflexion critique et de discernement peut conduire au subjectivisme religieux fondamentaliste ou au syncrétisme chrétien superficiel et délavé. En ce sens, l'Assemblée d'Aparecida a marqué de façon décisive le besoin de formation pour tous les fidèles, non comme un endoctrinement, mais comme un approfondissement du chemin de la foi, qui doit nécessairement aller de pair avec le processus humain de croissance personnelle.

 

 

 

CULTURE ET INCULTURATION

 

S'appuyant sur le Concile, un concept subjectif de la culture comprend toute recherche personnelle de l'homme, dans ses qualités spirituelles et corporelles (GS 53). Un concept objectif de la culture comprend la culture de trois relations humaines de base : relation avec la nature, pour la modifier, la dominer et d'en retirer des biens de consommation et de service; relation avec l'homme, pour rendre la coexistence plus humaine, à travers l’ amélioration des coutumes et des institutions; relation avec Dieu à travers pratique religieuse (GS 53) : l'attitude selon laquelle un peuple affirme ou nie une relation religieuse avec Dieu est essentielle pour toute culture, à cause des valeurs ou des anti valeurs que cela entraîne. (Puebla 386, 389)

Un concept sociologique (ethnologique) découvre une pluralité de cultures dans l’

histoire, divers modes de vie commune (GS 53), avec différentes échelles de valeurs, différentes façon de travailler, d'utiliser les choses, de s'exprimer, de pratiquer la religion, d'établir lois et institutions juridiques, pour créer de l'art et cultiver la beauté. Que cette culture soit l'héritage de chaque communauté demeurera explicite dans les réflexions de Puebla .

 

 

 

 

 

 

ÉVANGÉLISER LA CULTURE

 

Pendant le chemin parcouru, un moment décisif a été le Synode des évêques sur

l'évangélisation, qui a été célébré à Rome en 1974 et a abouti à l'exhortation apostolique de Paul VI (8 décembre 1975), "Evangelii Nuntiandi". Ce document était ce qui a guidé tous les travaux de la III Assemblée générale de l'épiscopat latino-américain célébrée à Puebla, en février 1979.

Ainsi pour la première fois dans l'histoire, le sujet de la culture est entré dans l'enseignement formel du Magistère de l'Église selon les documents de Vatican II avec l'affirmation de "Gaudium et Spes" qui soutient que l'homme n'atteint pas un niveau d’épanouissement si ce n’est par le moyen de la culture (GS 53) qui a une valeur propre et une autonomie légitime (GS 55 : AA7) grâce à la culture. Cela apparaît seulement dans Evangelii Nuntiandi avec le thème de l’Evangélisation de la culture et des Cultures, affirmant l’indéniable rupture entre l’Evangile et la Culture y les cultures, face au drame de notre temps, affirmant l’indéniable rupture entre Evangile et Culture.

 

 

 

Le pape et Puebla enseignent qu’évangéliser c’est évangéliser les cultures alors « la Bonne Nouvelle doit atteindre toutes les limites et transformer depuis l’intérieur la conscience personnelle et collective de l’homme (EN 18), les valeurs et les modèles de vie de l’humanité qui ne sont pas en accord avec le dessein de salut de Dieu (EN 19). Ce qui est important c’est évangéliser la culture et les cultures de l’homme, en partant de la personne considérée en elle-même et dans ses relations avec les autres et Dieu. (EN 20).

Puebla a consacré une large place à ce thème, (n.388-56) affirmant qu’évangéliser c’est arriver aux racines des Cultures, transformer les structures et l’environnement social, fortifier les valeurs authentiques des cultures, contribuer au développement des « semences de verbe », purifier les valeurs, séparer les idolâtries et les valeurs absolutistes, corriger les fausses conceptions de Dieu et les manipulations de l’homme contre l’homme.

Comme point spécifique de l’évangélisation de la culture en Amérique Latine on doit signaler la purification et la dynamisation par l’Evangile, le Catholicisme populaire (Puebla 457) ainsi que la promotion de la personne humaine selon la doctrine sociale de l’Eglise pour libérer de l’esclavage du péché personnel et social, et atteindre une convivialité digne des fils de Dieu. (472-506)

Puebla a développé la réflexion sur la culture de Gaudium et Spes, assimilé la proposition de Evangelii Nuntiandi sur l’évangélisation de la culture et la transformer en programme pastoral pour l’Eglise en Amérique latine : l’Evangile doit pénétrer les valeurs et les critères qui inspirent nos cultures. (Puebla 395)

Il y a dans toute l’Amérique latine « un substrat catholique » (n.7) « une culture imprégnée de foi » qui se manifeste dans les attitudes religieuses du peuple. (n.413) La religiosité populaire contient un ensemble de valeurs qui répondent avec sagesse aux grandes interrogations de l’existence (n.448) mais elles sont aujourd’hui menacées par l’urbanisation et le sécularisme et les structures d’injustice qu’on leur imposent. (n.37)

L’importance que Puebla accorde aux structures socio-économiques en tant qu’élément de la culture et objet d'évangélisation, constituent une grande contribution et une avancée pour le concept de la culture de GS et les défis de l'évangélisation que souligne « Evangelii Nuntiandi».

 

 

 

INCULTURATION DE LA FOI

 

 

 

D'un point de vue sociologique, l'expression "inculturation" désigne "le processus de

transmission et de communication par codes, à la fois linguistiques et iconiques, de

valeurs, normes de vie et lignes directrices comportementales d'un certain groupe socio-économique culturel aux nouvelles générations qui surgissent. C’est le processus par lequel l'individu reçoit, assimile, réinterprète et assume activement la culture dans laquelle il est né ou dont il commence effectivement à faire partie »(A. Do Carmo Cheuiche, Marco de référence actuelle sur le problème de l'inculturation, à Medellín 60).

 

 

 

L'inculturation a toujours été pratiquée par l'Église depuis ses débuts, dans son

travail missionnaire. Saint Paul l'a mis en pratique dans le monde grec et romain (« Je me suis fait tout à tous pour annoncer la bonne nouvelle » 1 Co 9,22-23). Le travail des grands missionnaires de tous les temps a été encadré par le processus d'inculturation. Les frères Cyrille et Méthode ont apporté la lumière de l'Évangile aux peuples slaves et ils ont préparé les textes liturgiques selon la mentalité et la langue slave: "Utiliser la connaissance de la langue grecque elle-même et la culture pour

un travail ardu et singulier, ils se préfixèrent la tâche de comprendre et de pénétrer la langue, les coutumes et les traditions des peuples slaves, en interprétant fidèlement les aspirations et les valeurs humaines qui subsistaient et qui s'y exprimaient » Encyclique Slavorum Apostol, 2 juin 1985). Les apôtres jésuites de Chine, Matteo Ricci et Martino Martini au 17ème siècle ont pu intégrer les rites chinois et malabars dans la liturgie catholique. Dans la région du Paraguay lors de la première évangélisation, le franciscain Luis Bolaños a écrit la première grammaire, le premier dictionnaire et un livre de sentences en guaraní ; puis le bienheureux José de Anchieta de la Companíe de Jesús a étudié la langue Tupí et a composé la première grammaire de cette langue, avec un catéchisme, de la poésie et des hymnes pour l'évangélisation.

Lorsque Puebla indique certains critères pour assumer les cultures, il parle d'une

incarnation (n. 400), mais ne développe pas le problème de l'inculturation de l'Évangile. C’est Jean-Paul II qui a officiellement recueilli dans la lettre apostolique Catechesi tradendae de 1979 le terme "inculturation" et le consacre en déterminant son sens et en lui donnant une portée universelle. Ce sera l'un des sujets que vous aborderez le plus fréquemment lorsque vous aborderez l'évangélisation, en la montrant comme un aspect important de celle-ci. Dés, les premiers mois, au début de son pontificat, le 27 avril 1979, il a déclaré que "l'inculturation est une composante de l'Incarnation ". C'est-à-dire que l'inculturation de la foi et de l'Évangile sont une conséquence pratique de l'Incarnation du Fils de Dieu, qui a tout sauvé et seulement ce qui est assumé ("quod non est assumptum non est redemptum", Saint Irénée) : l’Eglise doit assumer toutes les cultures en les purifiant ou en éliminant ce qui est contraire à son esprit, mais en les préservant de toute autodestruction. L’inculturation est la pénétration du message évangélique dans les cultures selon la manière même suivant laquelle la Parole s’est faite chair et il est venu habiter parmi nous. (Jean ,1, 14).

Dans l’encyclique Redemptor Hominis de 1979 le pape commence par un discours anthropologique sur l’homme. L’homme, dans la plénitude de son être personnel est à la fois communautaire et social : c’est le chemin obligatoire que doit parcourir dans l’accomplissement de sa mission… chemin tracé par le Christ lui-même qui invariablement apporte la semence de l’Incarnation et de la Rédemption. (n.14) Parlant à l’UNESCO à Paris en 1980, il expose qu’il « faut affirmer l’homme pour lui-même », non pour un autre motif ou une autre raison, uniquement pour lui-même. Il continue en exposant : « l’homme vit une vie véritablement humaine grâce à la culture : par elle l’homme en tant qu’homme devient plus homme. Dans une allocution devant les fidèles à Bergame en 1982, parlant de la culture chrétienne et de l’évangélisation de la culture, le pape signale comme axes fondamentaux qui guident tout son Magister : un sain concept anthropologique de culture et un concept théologique d’inculturation de l’Evangile.

C’est à travers la culture que l’Evangile peut s’approcher de l’homme, à cet homme qui es le principe, le moyen et la fin de la culture « La culture fait l’homme et l’homme fait la culture”) (Juan Pablo II en la Université de Coimbra, Portugal).

Entre christianisme et culture il y a une connexion inséparable, harmonique, comme celle qui a toujours existé entre religion et culture. Pour que l’Evangile s’approche de la culture et à travers elle de l’homme, l’Evangile doit connaître le langage et les catégories mentales de la culture qu’elle rencontre, ses formes de vie, ses valeurs. Ainsi elle pourra les intégrer dans la foi chrétienne et les transformer progressivement jusqu’à arriver à une incarnation vitale dans cette culture. L’Inculturation c’est également le processus par lequel la foi se fait culture. Dans un tel processus la fidélité à l’expérience historique de Dieu se fait indispensable dans le contexte d’une détermination culturelle particulière, fidélité à la tradition apostolique et fidélité à la communion ecclésiale universelle. L’inculturation ne peut jamais être réduite à un seul terme de cette triple fidélité. Souvent, faute de clarté il y eut des cas d’impositions ou d’adaptations superficielles dont les résultats négatifs ont été déplorés par Paul VI dans Evangelii Nunutiandi. De ces exemples concrets, imposés et épidermiques de l’annonce évangélisatrice, les Eglises locales ne sont pas nées fautes d’être capables de transformer son environnement culturel et d’être missionnaire dans une dynamique. Mais au contraire le résultat a été de cas d’une christianisation superficielle ou qui a provoqué une sorte de syncrétismes.

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L'Église, dans son désir de promouvoir une évangélisation authentique à partir d'une saine inculturation de l'Évangile dans une pluralité de cultures, fait face au défi de concevoir de sages et de nouveaux outils et des structures créatives pour comprendre la réalité, pour un dialogue interculturel, une réflexion et une formation théologiques, et de communion collégiale pour sauvegarder et activer chacun des termes de cette action.

Le salut doit parvenir à tous les hommes et à tous les hommes dans leur vie quotidienne et concrète, c'est pourquoi l'Évangile, lorsqu'il entre en contact avec les Cultures, incorpore ses valeurs authentiques et finit par créer une culture : "Une foi qui ne devient pas une culture est une foi qui n’est pas pleinement accueillie, pas entièrement pensée, pas fidèlement vécue ", a déclaré le Pape à Rome, en 1988. La foi incorpore des hommes concrets dans le peuple de Dieu, et cela doit être fait sans les déraciner de leur propre peuple et culture. Toute l'action de l'Église tend à

 

 

 

Accueillir en son sein ceux qui veulent être disciples de Jésus-Christ et doit les accompagner sur le chemin de la vie qu'ils font jour après jour avec tout leur bagage culturel vécu en communauté. Il y a une réciprocité constante entre l'évangélisation d'un peuple et l'inculturation de l’Evangil e; mais pour que ce lien soit fructueux, il est essentiel de rendre ce lien capable de culture, d'exprimer manifestement les signes de la foi et d'être encouragés à entrer dans le processus de purification des traditions et des formes incompatibles avec l’Evangile. C'est aussi à l'Église de se rendre capable de pouvoir assimiler les valeurs de ce Peuple et de comprendre comment l'Evangile est reçu. Ce juste équilibre, ne signifie pas qu'il n’y ait pas de fluctuations ; il sera possible de communiquer le message évangélique à un peuple avec toute l'authenticité et la force de la parole de Dieu, mais aussi avec toute l'authenticité et la force de la réalité culturelle et l'être même de ce peuple.

 

 

 

Un autre moment important pour l'évolution de cette pensée aura lieu lors

de la célébration de la IVe Conférence générale de l'épiscopat latino-américain

dont l'axe sera le thème "Nouvelle évangélisation promotion humaine-culture-chrétienne".

Le chapitre III de la 2e partie du document de Saint-Domingue traitait du thème de la Culture Chrétienne qui contient des informations abondantes sur l'inculturation et l'évangélisation inculturée. (n 248).  La crise de la disparition des valeurs humaines et chrétiennes apparaît alarmante, et un moyen d'attaquer ce défi est l'inculturation de l'Évangile, à la lumière des trois grands mystères du salut : Noël (Incarnation), Pâques (souffrance rédemptrice) et Pentecôte (action de l'Esprit qui nous conduit à comprendre dans notre propre langue les merveilles de Dieu). Une évangélisation inculturée doit être offerte aux frères indigènes, en respectant leurs expressions culturelles, en apprenant leur vision du monde qui, de la globalisation DIEU-HOMME-MONDE, fait une unité qui imprègne toutes les relations humaines, spirituelles et transcendantes. On doit recevoir avec estime les expressions religieuses, symboles et rites compatibles avec le véritable sens de la foi . La culture moderne (n.252-254) et la ville exige une nouvelle pastorale. (255ss).

Dans l'encyclique "Redemptoris Missio", Jean-Paul II montre qu’à l’approche du troisième millénaire, il y a nécessité urgente de porter l’Évangile à tous les peuples. Depuis la fin de Vatican II et à 25 ans du décret conciliaire "Ad gentes" le nombre a presque doublé de ceux qui ne connaissent pas le Christ. Dans l'exhortation apostolique "Ecclesia in Africa" ​​de 1994, il est dit que les voies de la Mission seront : le témoignage de la vie chrétienne, le kérygme ou l'annonce du Christ crucifié, mort et ressuscité, la conversion et le baptême, la formation des communautés chrétiennes, l’inculturation ou processus d’insertion dans les cultures des peuples, le dialogue avec les autres religions, l’éducation des consciences pour promouvoir le développement. Tout ce programme devra être motivé par l’amour.

 

 

 

Inculturer c’est transformer intimement les authentiques valeurs culturelles en valeurs chrétiennes, les intégrer dans une même vision de la vie, et à chaque fois enraciner le christianisme dans les diverses cultures après réflexion et praxis. Ce n’est pas un processus facile, cependant on ne peut en aucune façon diluer les caractéristiques et l’intégralité du message chrétien. Inculturer c’est incarner l’Evangile dans les diverses cultures, transmettre les valeurs, reconnaître les valeurs des diverses cultures, de soins prudents, et par-dessus tout une écoute sapientielle pour les purifier, éviter les syncrétismes ? Cela nécessite des périodes de préparation cultures diverses, les purifier, éviter les syncrétismes. Cela nécessite des périodes de préparation, de soins prudentiels mais surtout d'écouter la sagesse des voix de l'Église Universelle, de tout le peuple chrétien. C’est par la

réflexion et l’expérience du peuple chrétien que le véritable sens de la foi est atteint.  Participent à ce travail, pasteurs et fidèles, et tout le peuple de Dieu. (Cfr Lumen Gentium 12).

 

 

 

C’est pourquoi l’inculturation de la foi ou l’évangélisation de la culture est encadrée par la logique du mystère de l'incarnation, de la mort et de la résurrection. Cela commence par un effort pour exprimer la foi dans les catégories et les modes de cette culture, dans une tentative d'incarnation.

Dans la deuxième étape, l'Évangile réalise un discernement de cette culture afin qu'elle se dépouille de ce qui en elle s’y oppose. De la mort d'éléments non compatibles et donc non assimilable, ressuscite une nouvelle culture chrétienne originale. Chaque culture est le produit de l'homme par conséquent elle sera donc marquée par le péché : aussi la culture doit être purifiée, élevée, perfectionnée (Encyclique Redemptoris Missio 54).

En 1994, dans la lettre apostolique "Tertio millenio adveniente" le pape Jean-Paul II (n. 38) annonce deux Synodes continentaux : un pour les Amériques, si différentes dans leur l’histoire et leur situation sociale, et un autre pour l’Asie, avec la réunion du christianisme avec les plus anciennes cultures et religions locales.

 

 

 

L'Église existe pour évangéliser (EN 14) et l'évangélisation à pour objet

"transformer de l'intérieur, renouveler l'humanité elle-même." L'inculturation est proposée comme une priorité et une exigence d'évangélisation, un chemin vers la pleine évangélisation, le grand défi aux portes du troisième millénaire (EA 59).

L'inculturation prépare l'homme à accueillir Jésus-Christ dans l'intégrité de son

être personnel, culturel, politique, économique, sanctifié par l'action de l'Esprit (EA 62). Ce n'est pas une simple adaptation du kérygme ou de la liturgie, ni une tactique pour rendre le christianisme plus attractif, même au prix d’une mutilation de la Révélation. C'est une catéchèse patiente et une recherche amoureuse de ces "semences du Verbe" qui, lorsqu'elles mûriront, produiront les fruits d'une civilisation de l'amour. Elle englobe les domaines de la vie de l'Église : la théologie, la

liturgie, la vie et la structure de l'Église dans sa double dimension, celle de transformer les authentiques valeurs culturelles en les intégrant au christianisme, et celle d'enraciner le christianisme dans les différentes cultures humaines (Redemptoris Missio 52).

 

 

 

Un aspect important de l'évangélisation inculturée est la découverte de l'homme dans

le sens de la dignité humaine retrouvée. Dieu rend à l'homme sa dignité inaliénable

de personne et de fils de Dieu à travers l'Incarnation de son Fils unique. Ce ministère de l'évangélisation dans le domaine social, dénonce et combat tout ce qui avilit et détruit l'homme, cela fait partie de l'inculturation de l'Évangile (EA 7O).

 

 

L'INCULTURATION COMME ACTION DU SAINT-ESPRIT

 

 

 

" Par l'inculturation, l'Église incarne l'Évangile dans les différentes cultures et, en même temps, introduit les peuples avec leurs cultures dans sa communauté ; elle leur transmet ses propres valeurs, en assumant ce qui est bon en elles et

les renouvelant de l'intérieur "(RM 52).

"L'inculturation constitue un chemin vers la pleine évangélisation afin que

chaque homme puisse accueillir Jésus-Christ dans l'intégrité de son être personnel et culturel, économique et politique, en vue de son union pleine et entière avec Dieu le Père et une vie sainte sous l'action du Saint-Esprit " (EA 62).

 

Pour pénétrer et faire fermenter les façons de penser avec le levain de l'Évangile,

pour faire ressentir et agir à partir d'autres cultures, l'action de l'Esprit Saint est nécessaire et essentielle. C’est lui qui anime l’histoire et qui peut la conduire jusqu’à « la nouvelle création ». (Apoc. 21,5).

 

 

 

C’est ce même Esprit qui a été présent à l’Incarnation, dans la vie, et la Résurrection de Jésus, qui agit dans l’Eglise. Tout ce que l’Esprit fait dans les hommes et dans l’histoire des peuples a un rôle de préparation évangélique et on ne peut pas ne pas se référer au Christ, Verbe Incarné par l’œuvre de l’Esprit, « par lequel l’homme parfait, Sauveur de tous, qui récapitulera toutes choses ».

 

 

 

L’inculturation est également liée de façon profonde au mystère de la Pentecôte grâce à l’effusion et à l’action de l’Esprit qui unifie les dons et les talents. Tous les peuples de la Terre qui entre dans l’Eglise vivent une nouvelle Pentecôte Ils professent dans leur propre langue l’unique foi en Jésus Christ et proclament les merveilles que le Seigneur a réaliser pour eux. L’Esprit qui, au plan naturel est la source originelle de la sagesse des peuples, les guide avec une lumière surnaturelle vers l’Eglise jusqu’à la connaissance de toute la vérité. A son tour l’Eglise, assumant les valeurs des diverses cultures, se fait « l’épouse ornée »,«  la fiancée qui se pare de ses joyaux » ” (cf. Is 61, 10. Iglesia en África 61).

« L’événement de ce jour a été certainement mystérieux, mais aussi très significatif ». Nous pouvons découvrir en lui un signe de l’universalité du christianisme et du caractère missionnaire de l’Eglise ; l’hagiographe nous la présente consciente de ce que le message est destiné aux hommes de « toutes les nations », et que de plus, c’est l’Esprit Saint qui intervient pour faire que chacun comprenne au moins quelque chose dans sa propre langue : « Nous les entendons dans notre propre langue (Hch 2, 8). Aujourd’hui nous parlerions d’une adaptation aux conditions linguistiques et culturelles de chacun. Pour autant nous pouvons voir en tout cela une première forme d’«inculturation », réalisée par l’action de l’Esprit Saint. (Audience générale Mercredi 20 septembre 1989).

 

 

 

La révélation de Dieu ne peut pas ne pas être inculturée, mais les cultures sont différentes et changeantes comme l’homme à travers son histoire ; grâce à cela seulement la Bonne Nouvelle sera vivante, sous l’action de l’Esprit qui fait que la parole de Dieu résonne avec une force salvatrice, elle interpelle et annonce en langage approprié pour que l’homme puisse la recevoir dans les circonstances de sa vie propre. L’Esprit est celui qui assiste pour que soit respectée la pluralité des expressions de la foi. Sous l’action de l’Esprit l’autocommunication de Dieu s’illumine selon les circonstances changeantes. Il est évident que les diverses transculturations du message vont enrichir progressivement leur compréhension De plus l’intelligence du mystère révélé va croître, se transmettre et s’expérimenter, l’Esprit nous conduisant à la pleine vérité.

 

INCULTURATION ET RELIGIOSITE POPULAIRE

 

L’inculturation de la foi est une des questions prioritaires dans l’Eglise aujourd’hui.

 «La synthèse entre culture et foi n'est pas seulement une exigence de la culture, mais de la foi.  Une foi qui ne se fait pas culture, c'est une foi qui n'est pas pleinement acceptée, ni totalement pensée ni fidèlement vécue. »(Jean-Paul II. Lettre par laquelle il institue le Conseil pontifical de la Culture). La foi n'est pas une idée, une philosophie ou une idéologie. La foi procède d'une rencontre personnelle avec Jésus-Christ, le Fils de Dieu fait chair. La personne qui découvre l'amour de Dieu dans sa vie n'est pas la même qu'avant. Et un peuple qui croit au Dieu vivant et vrai, Jésus-Christ, et le suit, est un peuple particulier. Pour cette raison, la religiosité populaire est la foi des gens simples, qui devient vie et culture ; c’est la façon particulière que les gens ont de vivre et d’exprimer leur relation avec Dieu, avec la Vierge et avec les saints, dans l'environnement privé et intime et aussi en communauté d'une manière spéciale.

 

 

 

Pour valoriser positivement la religiosité populaire, nous devons partir d'une anthropologie radicalement pleine d'espérance. L’homme doit être défini par son ouverture à la transcendance. Il faut partir d’une anthropologie qui considère l’homme comme une unité corps-esprit, ouverte à l'infini. L'homme découvre Dieu, à partir de ce qu’il est et dans la réalité concrète de sa vie. Le Dieu de la révélation chrétienne se manifeste dans ces réalisations, les ouvrant toujours vers leur destin transcendant.

A Puebla, on nous a parlé d’anthropologies insuffisantes et incompatibles avec la dimension religieuse de l'homme : déterminisme, psychologisme, économisme ; étatisme, scientisme…

La valorisation de la religiosité populaire part d'une conception de l'homme comme

l'être du transcendant, du sacré. L'homme est la seule créature capable d'adorer, et

et il manifeste son intelligence si il arrive à une confession de foi adoratrice. Une anthropologie chrétienne part de l'hypothèse de la dignité de l'homme et de toutes ses manifestations, dont celles qui se trouvent aussi dans toutes les expressions de la religiosité populaire.

 

 

 

La religiosité populaire est simplement la religiosité des croyants qui ne peuvent même pas exprimer leur foi chrétienne publiquement, avec une spontanéité sincère et simple, reçue de génération en génération, et qui a façonné la vie et coutumes de tout leur peuple.

 

 

 

L'Église catholique en Amérique latine, en particulier depuis Vatican II, dans son

processus d'identification historique et de retour à ses racines redécouvre positivement la religiosité qui a grandi avec elle à partir du même XVIe siècle.

 

 

 

Mais ça n’a pas été pas seulement la validation de la religiosité populaire dans la vie des peuples qui a obligé les intellectuels à la réévaluer. C'est aussi son histoire, dans laquelle s’est révélé un dépôt effectif de la synthèse culturelle fondatrice de l'Amérique latine, produit aux XVIe et XVIIe siècles, qui a gardé jalousement la variété et l'interconnexion des substrats indiens, noirs et européens.

Réévaluer la religiosité populaire, c'est réévaluer le propre passé de l'Église

ainsi que sa continuité historique parmi les hommes du peuple latino-américain.

 

 

 

 

 

 

Dans cette perspective, la religiosité populaire peut être considérée comme une des rares expressions, sans en exclure d'autres, de la synthèse culturelle latino-américaine qui a traversé toutes les époques et qui recouvre en même temps toutes les dimensions : le travail et la production, les lieux d’implantations, les styles de vie, le langage et l’expression artistique, l’organisation politique, la vie quotidienne. Et précisément dans son rôle de dépôt de l’identité culturelle elle a supporté les assauts de la modernité qui voulait soumettre les cultures particulières aux diktats de la raison.

 

 

 

Cette religiosité populaire était présente dans le catholicisme dès les premiers moments. En Amérique Latine, la doctrine apportées par les missionnaires s’est « syncrétisée » avec des formes africaines ou indigènes qui a donné place dans quelques cas à des formes mixtes très bien intégrées.

Avec le cour du temps et avec les migrations vers les zones urbaines la religiosité populaire qui était propre à la campagne s’est étendue aux villes.

 

 

 

L’épanouissement dans les grandes villes des caractères distincts de religiosité populaire répond à la nécessité de l’homme de récupérer ses racines socio-religieuses, l’ouverture naturelle à la transcendance et la recherche des valeurs spirituelles. Face à la modernisation mais plus encore à la « post modernité », une forme communautaire de résistance s’est formée, un cri prophétique de l’homme qui ne veut pas nier le mystère de la transcendance dans l’horizon de la vie. L’homme de la campagne converti en citoyen de ville, se sent arraché à sa terre et ses traditions et rejeté d’un monde dans lequel seul compte la valeur personnelle et le travail spécialisé.. Sa tendance personnelle serait de retourner à son lieu d’origine mais il ne peut le faire d’une façon réelle et il se réfugie dans ce qui symbolise son essence, sa terre, ses traditions. Cependant une religiosité populaire urbaine pourrait surgir capable d’établir un pont pour unir ce qui semble apparemment impossible. De là et avec toute la charge émotive, même si cela ne change pas la situation réelle, on arrive à nouer un lien plus intime. Entre les saints, les dévotions, la fête, on reconnaît les siens et avec ce qui l’identifie le plus profondément, il peut faire de ce lieu inamical, sa maison.

La piété populaire comme manifestation visible et sensible de la religion populaire est un modèle d’incarnation de la foi dans les réalités culturelles qui les imprègne et en même temps qui s’enrichissent mutuellement. C’est-à-dire que c’est un mode d’inculturation de la foi. C’est sensible, et émouvant ; ni abstrait, ni rationnel. On en trouve dans une typologie variée de pratiques de dévotion dans lesquelles les valeurs religieuses sont vécues à travers des symboles et spécifiquement les chrétiens qui sont reliés à différents univers culturels qui se transforment en un moyen d'auto-évangélisation. Nous ne pouvons bien comprendre la religiosité populaire que si nous reconnaissons la culture comme un faisceau de relations.

 

 

 

L'expérience de la foi propre à la religiosité populaire découle du mode de vivre réel de l’homme et se rattache à l’expression de symboles, contes, mythe, croyances et rêves. "Plus que le mot et l'analyse, il privilégie le symbole, l'action, le rite, le mythique, le mouvement, le baiser, la chanson, la musique, les silences éloquents, les danses, les bougies et les fleurs etc. ” ( Víctor Manuel Fernández . Une interprétation de la religiosité populaire.)

 

 

 

Puebla voit la religiosité populaire en Amérique latine comme « une manifestation

sapientielle intégratrice de culture et de foi: c'est un composé de valeurs qui répond à la sagesse chrétienne; c'est la sagesse populaire catholique; elle assimile de façon créative le divin et l’humain; c'est un humanisme chrétien qui affirme radicalement la dignité de chaque personne en tant qu'enfant de Dieu, il établit une fraternité fondamentale, enseigne comment rencontrer la nature et à comprendre le travail, donne des raisons de joie et d’ l'humour, même au milieu d'une vie très dure. Pour le peuple c'est un principe et un instinct évangélique de discernement » .(Puebla 448 ).

 

 

 

La religiosité populaire a un profond sentiment de transcendance et, en même temps, elle est une expérience réelle de la proximité de Dieu, elle a la capacité d'exprimer sa foi dans une langue totale qui dépasse les rationalismes avec des aspects contemplatifs, que définissent les relations avec la nature et avec le reste des hommes, et offre un sens au travail, aux fêtes, à la solidarité à l’amitié à la famille et un sentiment de joie en sa propre identité qui ne se sent pas érodée par le poids de la vie, de la pauvreté et l’humilité qu’on y rencontre.

Le mode propre de la religiosité populaire est marqué par le cœur, la foi se trouve déterminée par les sentiments. Si quelques- uns n’acceptent pas ce type de religiosité argumentant que cela n’engage pas la personne, cependant les sentiments du cœur conduise la foi à s’exprimer en gestes et en délicatesse, avec le Seigneur et avec les frères.

L’aspect sensible n’est pas contradictoire avec les expériences plus profondes de l’esprit. Et pour cela il n’est pas nécessaire de se reporter aux grands mystiques de l’Eglise Catholique comme Saint Jean de la Croix, Sainte Thérèse ou Saint Ignace de Loyola qui nous montrent cette dimension sensible de la foi. Ce serait une grande valeur qu’un échange sain et enrichissant, que la religion populaire ajouterait à une Eglise souvent tentée de rationaliser et de rester dans des pensées ou des formulations qui n’engagent pas la vie.

 

 

 

Les expressions de la religion populaire sont le « signe de l’enracinement de la foi dans le cœur des divers peuples et de son entrée dans l’espace du quotidien ». Dans ce sens, la religiosité populaire est la première et fondamentale forme de l’inculturation de la foi. ( Víctor Manuel Fernández. Pour me frayer un chemin dans ce pays. Et pour rester. La vie pastorale, 2002 ) .

Cette foi faite culture est vécue spontanément, comme une partie inséparable de la vie propre, et c'est pourquoi c'est plus qu'une série de notions : c’est féconder la foi à partir du cœur ; configurer une manière particulière de vivre et d'exprimer le dynamisme de l'Esprit. Ce n'est pas seulement les manifestations massives de piété, mais aussi les expressions religieuses qui de façon capillaire font partie de la vie quotidienne, du langage spontané et familier, que la plupart sentent comme quelque chose de lié à leur identité. Ce que chacun a en commun avec le peuple croyant en général, mais qui est en même temps très personnel. (Annuaire sur la piété populaire et la liturgie. 91)

 

 

 

 

 

L'expérience de la foi se manifeste dans les gestes quotidiens et est vécue en

commun elle conduit à l'amour de Dieu et des hommes, et aide les gens et les

peuples à prendre conscience de leur responsabilité dans la construction de

l'histoire et la réalisation de leur propre destin. La religiosité populaire contient

une série de valeurs humaines et religieuses très importantes: «elle rend capable

de générosité et de sacrifice jusqu’à l'héroïsme quand il s’agit de manifester la foi.

Elle comporte un sens profond des attributs de Dieu :la

 

 

 

paternité, providence, présence aimante et constante. Elle engendre des attitudes intérieures qui s’observent rarement à un tel degré chez ceux qui n’ont pas cette religiosité : la patience, le sens de la croix dans la vie chrétienne, le détachement, l’ acceptation des autres ; la dévotion , une soif de Dieu que seuls les simples et les

pauvres » peuvent connaître(EN 48). Du point de vue anthropologique, la religiosité populaire se manifeste par les sentiments les plus profonds, "alborales" selon M. Eliade, qui sont : proximité de la nature, contact avec la vie et de la mort ; avec le besoin de se sentir en sécurité et intégré dans la réalité complexe. Cette façon de positionner les gens montre en même temps la nécessité du salut au milieu des menaces de l’existence et celle de donner une unité à la vie à travers des symboles et des récits.

En Amérique latine, la religiosité populaire configure l'identité historique : c'est la

décantation d'une histoire d'évangélisation qui intègre de façon plus ou moins consciente une multitude d'éléments culturels et religieux de nombreux peuples, races et cultures. Dans le substrat de la religiosité populaire on trouve des contributions autochtones (rythmes, vêtements, musique, nourriture, etc.), la culture afro-américaine colorée par l'expérience de l'esclavage, la nostalgie des origines avec leurs rites de transe et de guérison, les apports du terrain rural et l'influence des couches sociales urbaines marginalisées qui se regroupent pour garder ses valeurs.

D'où "l'importance de la piété populaire pour la vie de foi du peuple de Dieu,

pour la préservation de la foi elle-même ... La religiosité populaire a été un instrument

providentiel pour la préservation de la foi où les chrétiens étaient privés de

pastorale » ( Directoire sur la piété et la liturgie populaires) . En ce sens, il convient

de mettre en valeur l’importance des signes chrétiens qui imprègnent la culture de secteurs populaires qui apportent à des millions de personnes une sensibilité favorable à Dieu et produisent une transmission spontanée de la spiritualité chrétienne. Cette religiosité chère aux pauvres s’est transformée souvent en un chemin utilisé par L’Esprit pour atteindre le cœur et commencer le retour de beaucoup de ceux qui se sont éloignés, à une vie d’amitié avec Dieu. Dans d’autres cas il s’est produit une silencieuse mais ferme adhésion à la foi chrétienne offrant un sentiment d’identité et d’appartenance.

 

Dans cette transmission, le peuple n’est pas une masse anonyme et passive mais un sujet actif. Durant longtemps on n’a pas reconnu que la majorité du peuple pauvre comme sujet culturel. Pour cette raison la religiosité latino-américaine à partir de préjugés supposés qui dévalorisait le peuple, a été considérée comme quelque chose d’archaïque, fétichiste propre à des ignorants. Dans les manifestations les plus authentiques de la piété populaire, de fait, le message chrétien assimile pour une part les modes d’expression de la culture du peuple, et pour une autre part, communique les contenus évangéliques selon la conception de ce peuple sur la vie, la mort, la liberté, la mission et le destin de l’homme. Ainsi la transmission des pères aux fils, d’une génération à l’autre des expressions culturelles apporte la transmission des principes chrétiens. Dans certains cas la transmission est si profonde qu’elle apporte des éléments propres à la foi chrétienne. Dans quelques cas l’union est si profonde que des éléments propres de la foi chrétienne se sont transformés en composants de l’identité culturel d’un peuple. Comme exemple on peut prendre la piété envers la Mère du Seigneur. (Répertoire sur la piété populaire et la liturgie. 63). Aparecida va jusqu’à parler de « mystique populaire » (nº 262).

 

 

 

 

L'Église est confrontée à plusieurs défis. Aujourd'hui plus que jamais on trouve sur le tapis, lorsqu'il s'agit de proposer une œuvre évangélisatrice, le thème de la vie. C'est clairement dans la conscience de toute l'Église que l'enjeu de la vie et de là "la vie en abondance" que Jésus-Christ nous apporte. D'où la nécessité de concentrer dans cette perspective tous les efforts. Aparecida met sous nos yeux la réalité d'une culture de la mort, dont certains les signes les plus évidents sont : l’augmentation de la pauvreté et de l’extrême pauvreté, la concentration des richesses, le manque d’équité, loi du marché, le néolibéralisme, les paradis de la finance, la crise de la démocratie, la corruption, l’immigration, la discrimination sociale, le terrorisme, la pollution de l'environnement, la crise familiale, l’avortement, l’euthanasie, le subjectivisme, le consumérisme, l’imposition de la culture moderne et le mépris des cultures ancestrales, l’individualisme, la crise des valeurs, le relativisme moral, la distanciation entre la foi et la vie.

 

C'est une dure constatation pour l'Église qu'après avoir animé la vie et culture latino-américaine pendant plus de cinq siècles, le sens religieux du peuple s’est érodé (DA 38), la foi ne se transmet pas de génération en génération avec la même fluidité (DA 39). Aparecida, loin de se morfondre dans le regret ou la condamnation de la situation, reconnaît humblement qu’elle n'a pas les réponses aux problèmes et que c'est une invitation à discerner à la lumière du Saint-Esprit pour se mettre au service du Royaume dans cette réalité.(DA 33).

 

 

 

Il est imprescriptible "que le zèle missionnaire nous consume pour porter au cœur

de la culture de notre temps, ce sens unitaire et complet de la vie humaine que ni la science, ni la politique, ni l'économie, ni les médias peuvent fournir. Dans la Parole du Christ, Sagesse de Dieu, la culture peut retrouver son centre et sa profondeur, d'où l’on puisse regarder la réalité dans l'ensemble de tous leurs facteurs, les discernant à la lumière de l'Évangile et donnant à chacun sa place et sa dimension adéquate » (DA 41). Les disciples missionnaires sont appelés à être créatifs

dans les domaines de la culture, de la politique, de l'opinion publique, des arts et des sciences, endroits qui ont été fréquemment abandonnés. « En assumant avec une force nouvelle cette option pour les pauvres » (399). Evangéliser la culture loin d’abandonner l’option préférentielle pour les pauvres » la renouvelle. (DA 397, 398, 399).  Le compromis avec la réalité naît de l’amour passionné du Christ qui accompagne le peuple de Dieu dans la mission d’inculturer l’Evangile dans l’histoire avec une charité samaritaine ardente et infatigable.

L’Eglise pour assumer le grand projet du Règne, selon le style de Jésus devra rénover les modes d’approche, d’interaction, et redécouvrir dans la culture existante les points d’ancrage.

L’évangélisation de l’actuelle culture post moderne réclame dans l’intérieure de l’Eglise et en en dehors d’elle un travail pastoral qui prenne en compte la parole, les actions, les signes et les symboles, un imaginairequi exprime l’option de la vérité sur Dieu et sur l’homme. (gras dans le texte)

 

 

 

Cela implique la création d'un nouveau paradigme culturel , comme une vraie alternative à la pensée unique dominante, qui tienne compte des principales préoccupations et des pôles d'intérêt des hommes d'aujourd'hui: réalité sociale, la pensée

écologique, la cosmologie moderne, les ethnies, la paix, l’éthique de l’attention, la miséricorde et la compassion.

 

La piété populaire, dans cette recherche, recueille les d'affirmations les plus importantes qu'Aparecida nous offre, un chemin privilégié . Elle est pour le peuple latino-américain l’expression de la foi catholique, elle contient la dimension la plus précieuse de la Culture latino-américaine, elle pénètre délicatement l’existence personnelle de chaque fidèle et bien qu'elle soit vécue par une foule, elle peut être approfondie et pénétrer à chaque fois mieux le mode de vie de nos peuples, et être un imprescriptible point de départ essentiel pour faire en sorte que la foi du peuple murisse et devienne plus féconde, contienne et exprime un sentiment intense de la transcendance, une capacité spontanée à s'appuyer sur Dieu et une véritable expérience d'amour théologal ; c'est une manière légitime de vivre la foi, expression de la sagesse surnaturelle, une façon de se sentir membre de l'Église et une manière

d'être missionnaires, c'est une puissante confession du Dieu vivant qui agit dans l'histoire et un canal de transmission de la foi. (Aparecida 258, 259, 261, 262, 263, 264). (gras dans le texte)

 

La religiosité à partir de ses différentes expressions si vivantes et significatives peut venir au secours de l'homme, de son identité et de sa vocation à la vie. En elle, selon les mots du Pape "apparaît l'âme des peuples latino-américains", est "le précieux trésor de l’Eglise Catholique en Amérique latine" et « reflète une soif de Dieu que seuls les pauvres et les humbles peuvent savoir ». Le peuple humble a généré et transmis à travers les manifestations de plusieurs siècles ce que sont les moyens dont il dispose pour célébrer la vie. La religiosité populaire a des espaces d'expression particulière de la foi dans les sanctuaires  dispersés à travers l'Amérique latine et les Caraïbes. Le sanctuaire tient dans l'histoire de la foi chrétienne en Amérique un rôle prépondérant. Il serait très difficile pour l'Église d’établir une approche des grands groupes humains qui s'identifient à la foi

catholique - bien qu'ils ne le fassent pas toujours de manière expressive formelle - sans la présence et l’action pastorale des sanctuaires. Par leur piété, les gens simples vont au sanctuaire et se souvient que son origine est dans le Seigneur et aussi que le Dieu qui nous a aimé ne cesse jamais de nous aimer et qu'aujourd'hui, au moment précis de l'histoire où on se trouve, face aux contradictions et aux souffrances du présent, Il accompagne le chemin de la vie. Tout comme l'Ancien et le Nouveau Testament en témoignent de façon unanime, le Temple est le lieu de mémoire d'un passé salvifique et de l'atmosphère de l’expérience actuelle de la grâce.

 

 

 

Le sanctuaire est le signe de la présence divine, le lieu de l'actualisation toujours

nouvelle de l'alliance des hommes avec l'Éternel et entre-eux. En allant au sanctuaire, l'Israélite pieux redécouvrait la fidélité du Dieu de la promesse dans chaque "aujourd'hui" de l'histoire. Le temple est la demeure sainte de l'Arche de l'alliance, le lieu où s’actualise le pacte avec le Dieu vivant et où le peuple de Dieu prend conscience de constituer la communauté des croyants, " lignée choisie, sacerdoce royal, nation sainte" (1 Pierre 2,9). Le sanctuaire est le lieu de l'Esprit, car c'est le lieu où la fidélité de Dieu atteint les hommes et les transforme. On va d'abord au sanctuaire pour invoquer et accueillir la grâce de l'Esprit, et pour le porter en toutes les actions de la vie. Le sanctuaire est, par excellence, le lieu de Parole, lieu privilégié de pardon, de réconciliation et d'action de grâce. En lui, le fidèle à travers les sacrements, réalise la rencontre des vivants avec Celui qui donne continuellement et nourrit d'une vie toujours nouvelle, dans la consolation et l'espérance, ceux qui viennent

 

 

 

affamés et assoiffés. Au sanctuaire on arrive comme le temple du Dieu vivant, le lieu de l’alliance vivante avec Lui, afin que la grâce des sacrements libère les pèlerins du péché et leur donne la force de recommencer avec une nouvelle vigueur et une nouvelle joie dans cœur, pour être des témoins transparents de l'Éternel parmi les hommes. Cette fidélité de Dieu provoque des alliances qui sont les «promesses» du pèlerin.

Dans le sanctuaire, on apprend à ouvrir le cœur de tous, en particulier à ceux qui sont différents de nous: l'invité, l'étranger, l'immigrant, le réfugié, celui qui professe une autre religion et le non-croyant. Ainsi, le sanctuaire, en plus de se présenter comme un espace de l'expérience de l'Église, devient un lieu de convocation ouvert à toute l'humanité.

"L'expérience de la piété populaire constitue une manière particulière d'approcher

un peuple humble, souvent éloigné des formes plus traditionnelles de pastorale.

Cela se transforme en une possibilité de communiquer l'Evangile, exprimé, vécu et

contextualisé dans le symbolisme et le rythme propres à la réalité du peuple croyant ». (Déclaration finale du IVe Congrès des recteurs de sanctuaires d'Amérique latine et de la Caraïbe)

Le pèlerinage est une autre expression de la religiosité populaire liée au sanctuaire.

Il possède une expression symbolique profonde qui manifeste profondément les recherches humaines de sens et de rencontre de l'autre dans l'expérience de la plénitude, de celui qui nous transcende et qui est au-delà de toute possibilité, de différence et de temps. Le pèlerinage permet l'expérience de la recherche et de l’ouverture ; on se socialise en marchant avec les autres pèlerins et on réchauffe son cœur, avec des sentiments de profonde solidarité.

La fête occupe une autre place importante, elle apparaît comme la clôture, l'accomplissement, de la gratitude mêlée à la joie, au chant et à la danse. A la fête tous les sens du corps interviennent dans un climat de joie et de bonheur. Le temps est réglé par un rythme alternatif de concentration et d’inactivité, actes religieux et actes profanes. Ce n'est pas une mise en scène avec spectateurs et rotagonistes. Même les spectateurs se transforment en protagonistes. La présence des autres, même celle des inconnus, intensifie le caractère de ce qui est célébré, car les célébrants se sentent obligés de montrer ce qui est célébré. La fête identifie également le peuple, car la célébration rassemble tous les voisins, ceux qui ont migré, et en attire même de nouveaux.

La dévotion mariale fortement enracinée dans la foi de notre peuple constitue

l'un des principaux signes d'identité, tout comme l'alliance avec Yahvé pour Israël.

Israël était conscient d’être le peuple élu, dépositaire de la loi et des prophètes. Par ses relations avec un Dieu proche, il était conscient de son caractère unique. Par analogie, le peuple chrétien saisit que la protection de Dieu lui vient de l'invocation d'une image de Marie, personnalisée et singulière, et que par cela, Marie personnalise et particularise ce peuple.

Le peuple se sent identifié par l'image de Marie, car leurs parents sont allés vers elle et eux viennent à elle aujourd'hui dans leurs problèmes. Admirer les vertus personnelles de Marie, la piété populaire se prévaut de ses attributs pour atteindre Dieu. L'action miraculeuse de Marie est le signe principal d'une protection individualisée dans un lieu et à partir d’un lieu. La supplication et la demande de faveurs sont une manifestation de l'alliance

 

 

 

 

mère-fils, de relations interpersonnelles, et d’engagement mutuel. Même s’il s’agit de personnes manquant de pratique sacramentelle, elles réagissent à la maladie ou à la souffrance en faisant une promesse. On peut marcher jusqu'au sanctuaire, faire la route en silence, faire le tour du sanctuaire à genoux, les bras en croix, portez des cierges ou faire des dons ; mais la plupart des promesses restent anonymes et les motivations restent anonymes dans l’intimité de la personne ou de la famille.

 

 

 

Dans les manifestations de piété populaire mariales, on peut sentir la loi de l’Incarnation. L'inculturation de la foi ne signifie pas seulement que la foi se conforme à des moules culturels préexistants, mais que la foi crée des signes d'identité et des moules de convivialité sociale, qu’elle les exprime, les remplit de vie et exprime la vie. " Les gens sont comme l’eau. Son cours est comme celui des rivières, qui inévitablement pélerine. Parfois comme les rivières de montagne, ils tombent verticalement et impétueusement vers la vallée. D’autres fois, comme nos rivières pampéennes, dociles et pépères et «velléitaires», par des détours ludiques, finissent dans l'océan. D'autres fois, enfin, comme notre Paraná, qui borde San Nicolás, qui, quand il est bas, est apparemment calme, mais qui cache en lui la force d'un torrent insoupçonnable. Le peuple est comme l'eau des fleuves qui pèlerine, il se jette toujours dans l'océan. Pourquoi les pèlerins et pas seulement ceux qui errent, ont-ils leur propre direction et leur propre objectif ?  Venant de la montagne ils vont vers l'océan ; venant de Haut, ils se dirigent vers l'Infini. Être une rivière, être un peuple, c'est précisément avoir la conscience d’une origine commune et le pressentiment de se donner un destin commun. Et cette conviction est renforcée dans les peuples quand, les gouttes d'eau se mélangent, par la foi chrétienne, avec le sang du Christ. Parce que le sang, c'est-à-dire la vie, celle du Christ et, dans le Christ, la nôtre, vient d'une Origine et, d'un pèlerinage à travers la mort, qui débouche dans la résurrection. Telle est la foi de notre peuple. Mais un peuple croyant qui pérégrine sur cette terre, qui est eau et sang, est toujours torrent. Torrent de rivière, torrent de sang. Torrent qui montre sa vitalité, dans la force avec laquelle il cherche la vérité, dans la force de son amour et avec lequel il embrasse ses idéaux. Toutes ces forces sont régulièrement concentrées dans la passion et l’imaginaire.

 

 

 

Le torrent est l’imaginaire du peuple qui emporte avec lui tout ce qu'il trouve et ce qu’il invente, mélangeant tout à l’aveugleL’imaginaire est invention. L’imaginaire du peuple n'est pas seulement la capacité d’inventer des histoires, mais aussi la capacité de trouver la vérité. Des vérités qui sont au-delà des contes, des anecdotes, des légendes ; noyaux vraiment substantiels de vérité revêtus de décors exubérants liés à la tendance ludique elle-mêrme de l’imaginaire. Le naître et le mourir, la rencontre de l’homme et de la femme, l’amour et la solitude, le travail et la maladie, le fait de faire le bien et de conduire au mal posent la question de la vérité que renferme la vie sous forme d’énigme et de mystère. On est tenté de donner des réponses sous formes d’intuitions divinatoires. Dès l’instant où la vie renferme

en elle quelque chose de divin, la vie devient une énigme. Dans sa recherche pressante de la vérité, le peuple teste la vérité en avançant dans l’imaginaire. Pour cela, il lui est plus facile d’accepter la parole de vérité que Dieu lui révèle dans le Christ. Et en même temps, il continuera à entourer la vérité révélée de l’exubérance de son imaginaire. (Le peuple est comme l'eau. Écrits théologiques pastoraux de Lucio Gera).

La proposition d'Aparecida est un appel à vivre ce moment de notre histoire

comme événement salvifique et ecclésial. Dans cette lumière, la mission de l'Église se

 

 

 

 

présente comme l'effort inlassable d'unir dans un seul message le transcendant avec l’immanent, l'éternel avec le quotidien, et en cela, la religiosité populaire comme une expression vraie et sensible de la foi, née à l'ombre de nombreuses douleurs, a beaucoup à nous dire. "La plus grande noblesse des hommes est d’élever leur travail au milieu de la dévastation, la maintenant infatigablement, à mi-chemin entre les larmes et la beauté »( Ernesto Sabato Avant la fin. Souvenirs). Les hommes, depuis l'Ancien Testament jusqu’à aujourd'hui, en chaque moment de l'histoire quand nous éprouvons le sentiment d'échec total et de chute, nous avons été sauvés par la partie la plus faible de l'humanité. La mission de L'Église se présente comme un service à la vie pleine, digne et heureuse dans Christ et ne peut se passer du peuple pauvre et humble qui, au milieu des difficultés de chaque jour, a essayé d'incarner cette proposition .

En tant que Peuple pèlerin de Dieu d’Amérique latine et des Caraïbes,

nous confions les disciples missionnaires à la tendresse, à la beauté et à la joie de l’amour de Dieu manifesté dans le visage métis de la Mère de Dieu, de la Vierge de Guadalupe. Elle conduit son peuple par la pupille de ses yeux et le protège au creux de son manteau. Ses mains jointes dans la supplication, nous encouragent à jeter les filets pour que tous s’approchent de Jésus, "le Chemin, la Vérité et la Vie" (Jn 14,6), parce qu'Il veut que chacun "ait la vie et l'ait en abondance" (Jn 10,10).

 

 

 

19 janvier 2008

Cardinal Jorge Mario Bergoglio 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Macron - Bergoglio : un discours unique

 

 

 

 

 

 

Ce tire est osé , impertinent, scandaleux. Je le maintiens.

 

 

 

Attila et Tamerlan, massacraient, pillaient, violaient. Leur empire fut éphémère et ne leur survécu pas. Attila épargna Lutèce avant sa défaite dans les Champs Catalauniques.

 

 

 

C'étaient des barbares ! Ils ravageaient des régions entières mais ils n'atteignaient pas l'âme des peuples. Ils étaient fascinés par l'or et la puissance invincibles de leurs propres armées. Ils ne cherchaient pas à créer un homme nouveau. Ils n'étaient pas les chantres d'un monde à inventer. Ils n'avaient pas reçu en héritage la Grèce et Rome. Leurs empires avaient des frontières mesurées par les pas de leurs chevaux.

 

 

 

Macron est l'homme de la tabula rasa.Nous laissons aux savants le soin de disserter sur la décivilisation de Renaud Camus comparée à celle de Norbert Elias.

 

 

 

En 2017 , Macron a déclaré « la culture française n'existe pas ».

 

 

 

En octobre 2018 au 17ème Sommet de la francophonie à Erevan, un commentateur précise «  que le président de la République a défendu une vision plurielle de la langue française « trop institutionnelle », il plaide pour « sa réinvention. »

 

 

 

« L’épicentre de la langue française est sans doute dans le bassin du fleuve Congo », a ainsi répété le président français Emmanuel Macron. Pourtant la nomination de Louise Mushikiwabo a suscité de nombreuses critiques pour des raisons autant morales que strictement linguistiques. Le Rwanda où l’anglais a pris le pas sur le français, fait désormais figure de terre de reconquête et les atteintes aux libertés y sont constantes. Mais le plurilinguisme n’est pas contraire à la défense du français, estime Emmanuel. Macron. C’est même le « combat fondamental pour notre langue », a-t-il répété.

Soulignant les reproches parfois faits à « une francophonie trop institutionnelle », il l’a appelée à se « réinventer » afin de prouver qu’elle n’est pas « un espace fatigué mais un lieu de reconquête, notamment contre l’oppression faite aux femmes ».

« Le premier combat de la francophonie, c’est la jeunesse et tout particulièrement en Afrique », a ajouté le président français soutenu par ses homologues nigérien et centrafricain. ( Nouvelle République).

Le 24 mai, 2023 le même Macron, déclare que nous sommes dans un processus de « décivilisation »..;un commentateur y voit « un concept malléable à souhait ».

 

 

 

Depuis plusieurs décades la « décivilisation » est permanente. On ne peut en accabler le seul Macron.

Depuis que l'on assassine les enfants à naître et que l'on euthanasie les malades et les vieillards on a changé de civilisation !

Avec l'augmentation et les exigences de la religion islamique en France on a changé de religion. Et il est stupéfiant que la république qui se fait une gloire de la séparation des pouvoir religieux et politique, installe une religion qui a pour fondement un pouvoir religieux qui est un pouvoir politique !

Quant à l'épicentre de la langue française il n'est plus à l'Académie Française ! Il est dans la confusion des genres et la réécriture des ouvrage pour satisfaire les gauleiters de la pensée.

La liste serait très longue des preuves : du wokisme à l'éducation sexuelle dès l'école maternelle, de Pap Ndiaye à Macron en passant par Verant, jamais la France na connu une pareille inversion, ou une pareille dénaturation de la nature humaine, de l'être humain en soi .

Mais la promesse originelle vos eritis sicut diis.... est celle d'aujourdh'ui, Vous serez comme des dieux. Demain on rase gratis. Le discours de Macron à Marseille est un morceau d'anthologie quatre jours avant les émeutes ! Des mesures techniques pour guérir une crise de civilisation ! Il faut dire que la civilisation et MACRON CA FAIT DEUX COMME DIT LE PEUPLE !

 

 

 

L'abandon en politique de toute métaphysique conduit au néant, le refus de l'être que l'on soit président de la république ou pape par détournement des règles du conclave conduit à la barbarie.

 

 

 

Le pape procède de cette même erreur lorsqu'il dénonce une utilisation idéologique de l'autorisation de la messe de Saint Pie V par les traditionalistes et qu'il invente un péché inconnu depuis deux mille ans, l'indiétrisme pour justifier l'interdiction de la messe dite selon le missel de Jean XXIII. Il y a là une pure invention – digne d'une dictature totalitaire- pour éliminer les opposants à une grande réforme bien plus radicale que celle de Luther... puisqu'elle vient de celui qui dit avoir été élu au dernier consistoire alors qu'il a été choisi sur un programme qu'il est tenu d'appliquer ! Ce qui a été formellement interdit par Jean-Paul II. ( voir notre blog sur cette VERITE!)

 

 

 

Mais celui qui a écarté de sa fonction le titre de Vicaire du Christ prétend maintenant changer le gouvernement hiérarchique de l'Eglise par un régime local et universel de synode copie de celui qui a conduit en France à la révolution de 1789, … les cahiers de doléances fabriqués à l'initiative des loges maçonniques. On voit déjà les résultats des synodes paroissiaux, diocésains et nationaux. Cette révolution est accompagnée de visites domiciliaires d'évêques réfractaires pour effrayer le marais des pleutres !

 

 

 

Macron - Bergoglio même combat : ils ont déclaré une guerre universelle à tout être humain et au Créateur ! Ils ont une « conception fantasmée de l'homme » ( Michel Geoffroy) : l'un par sa croyance aux règles technocratiques mondialisées de gestion de l'humanité ; l'autre par une croyance en une fraternité universelle à laquelle les francs maçons n'ont jamais cru mais qu'ils savent organiser.

La vision de Macron est la même que celle de Bergoglio . Seuls les mots changent.

Avec l'arrivée du cardinal Bergoglio les hérauts du changement sont arrivés au premier plan. Un article complet sur ce sujet est paru le 12 novembre 2014 sous le titre Rahner et Congar caracolent de nouveau (Rahner y Congar cabalgan de nuevo), de Jésus Garmilla. Cher lecteurs, pas la peine d'interroger vos informateurs, ils n'en n'ont jamais entendu parler. Ils ne savent rien mais ils font croire qu'ils savent.

 

 

 

Avec Congar « le mot réforme est devenu un véritable lieu théologique depuis la proclamation de François comme pape ». Et de citer «  Vraie et fausse réforme dans l'Eglise » (édité en espagnol par les jésuites de Sigueme) et « Pour une Eglise servante et pauvre ». Rahner a fait aussi très fort avec Changement structurel de l'Eglise.

Jesus Garmilla qui connaît bien ses classiques rapporte cela à Iglesia semper reformada, au dialogue oecuménique et à l'aggionamento de Jean XXIII.

 

 

 

Rahner avait averti que si l'Eglise ne se soumettait pas à un changement structurel, elle deviendrait un ghetto ou une secte. La dernière réunion à Rome pour la fraternité universelle confirme ce jugement paru en 1974. Evidemment nos évêques sont ailleurs !

 

 

 

Une dernière nouvelle qui date d'aujourd'hui confirme ce grand bon en avant.

 

 

 

Victor Manuel Fernandez (VMF) vient d'être nommé à la tête du dicastère pour la doctrine de la foi en remplacement du jésuite Ladaria. Ce dernier qui a montré une vive réaction au laxisme ambiant . Selon INFOVATICANA du 23 mai : Le cardinal Ladaria « a défendu Humanae vitae contre l'idéologie du genre et le transhumanisme ».

VMF a été le principal rédacteur des conclusions de la conférence du CELAM à Aparecida en 2007. Cette réunion de l'épiscopat latino-américain est connue pour avoir annoncé de programme de la nouvelle Eglise.

 

 

 

Voici dans notre traduction les conclusions d'Aparecida par le cardinal Bergoglio.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le pape François n’aurait pas dû être un inconnu car il avait annoncé son programme après la Vème Assemblée du CELAM à Aparecida en 2007. Tout est contenu dans son discours de clôture du 19 janvier 2008, y compris le rôle que doit jouer l’Eglise d’Amérique Latine pour changer l’Eglise de Rome. C’est un monument totalement ignoré de l’histoire de l’Eglise.

 

 

 

 

 

 

« La religion populaire comme inculturation de la foi dans l’Esprit d’APARECIDA.

 

 

 

« La V Conférence CELAM s’est tenue en mai dans le sanctuaire brésilien de

Aparecia. Ce fut un événement ecclésial. Un regard aigu sur la réalité

Latino-américaine qui exigeait que l'Église remplisse sa mission d'évangélisatrice.

Ce n’est pas quelque chose de nouveau que l’Eglise propose comme objectif l’évangélisation, il existe une impulsion originelle et fondatrice du christianisme pour annoncer le salut à tous les peuples (Mt 28, 19).

Mais le besoin urgent de mission que propose Aparecida parle de la

perception d’une érosion du catholicisme latino-américain. Pendant plus de

cinq cents ans, la foi chrétienne a pénétré la culture du continent et a offert une

religiosité qui nourrit la vie personnelle et nos peuples lorsqu'elle est accueillie avec

sincérité. Cependant, bien que les catholiques soient encore majoritaires, quelque chose est en train de changer. Le pape Benoît XVI a déclaré au début de la conférence: «  on perçoit un certain affaiblissement (…)de la vie chrétienne dans la société dans son ensemble et dans l’appartenance à l'Église Catholique en raison du sécularisme, de l'hédonisme, de l'indifférentisme et du prosélytisme des nombreuses sectes, des religions animistes et des nouvelles expressions pseudo-religieuses ».

 

 

 

Nous sommes dans une nouvelle ère, avec des changements profonds et accélérés. Cette réalité génère l’incertitude, la confusion et la peur dans le cœur des hommes et des femmes de notre temps. Dans le contexte latino-américain et caribéen, cela devient plus complexe et dramatique parce que nos peuples vivent une réalité où la pauvreté et l'exclusion augmentent, la corruption institutionnalisée prend racine, les violences de toutes sortes se propagent et se développent à mesure que la perte d’identité augmente.

 

 

 

Cette situation a engendré des changements vus par le Concile Vatican II

(GS 4-10) il y a quarante ans. Ces transformations se sont aggravées et le changement d’époque exige une nouvelle façon de nous situer dans l'histoire qui a changé et continuera de changer. Des choses dont nous pensions qu’elles ne se produiraient jamais ou que nous pensions ne pas voir de notre vivant, nous les vivons et l'avenir est incertain pour nous.

Les phénomènes survenus dans la post-modernité, les effets de la globalisation et tant d'autres, nous ne pouvons pas les évacuer en pensant qu’il s’agit d’une crise temporaire et que nous devons attendre que ça se passe pour que tout revienne comme avant. L'irréversibilité de la globalisation - si injuste à bien des égards – a une dimension positive « en tant qu’elle tisse des relations au niveau planétaire comme une réussite de la grande famille humaine et un signe de sa profonde aspiration à l'unité »(Benoît XVI, discours inaugural, 2).

C'est aussi une nouvelle occasion pour l'évangélisation d'atteindre l'ensemble du monde et pour que l’Eglise puisse travailler à l’unité des continents et entre les peuples pour rendre la collaboration et la crédibilité des chrétiens plus efficaces.

 

 

 

 

 

 

La forte conviction de la Conférence est que le chrétien ne peut pas ne pas être missionnaire et, que d'autre part, cette exigence ne puisse être vécue en profondeur et en vérité sans l’attitude du disciple : une rencontre personnelle et communautaire avec Jésus-Christ . Les Chrétiens que nous sommes sont disciples du Maître et donc nous ne pouvons pas regarder la réalité, sinon en termes de mission.

 

 

 

Nous ne sommes pas des observateurs impartiaux, mais des hommes et des femmes désireux de pénétrer toutes les structures de la société d'un amour que nous avons connu et qui dans la rencontre avec la réalité, est capable de la transformer en vie abondante.

Le pape dans son discours inaugural a déclaré que c'était «la meilleure chose qui nous soit arrivée dans la vie " et " que c’est ce que nous avons à offrir au monde pour combattre la culture de mort avec la culture chrétienne de solidarité, c’est un impératif qui nous touche tous. "(480) 

De manière concrète, avec une ouverture critique, sage et prophétique, avec une identité et avec discernement, l'Église en Amérique latine et dans les Caraïbes veut se mettre dans un état de "Disciple missionnaire", pour "donner vie à nos peuples", dans le Christ.

Le propre du disciple est le discernement : le « regard humble», l’écoute attentive. Le disciple ne sait pas, ni ce qu'il doit faire car il n’est pas un Maître. Il écoute et n’a pas de réponse. C'est cela l'Eglise d'Aparecida : une communauté de disciples missionnaires qui veulent écouter le Seigneur. L'écoute du Seigneur

cela se fait aussi en écoutant la réalité avec un esprit humble pour discerner ce qui est, ce qu’il y a à faire et le faire.

L'Amérique latine connaît, comme le reste du monde, une transformation

culturelle ; "La V Conférence cherche à établir des critères sur la façon d'évangéliser la culture, et sur la façon dont la Bonne Nouvelle peut être transmise à la population à partir de la culture de chaque peuple". (Cardinal Paul Poupard).

 

 

 

LE CHEMIN DEJA PARCOURU

 

 

 

Quand nous considérons la réalité de l'évangélisation en Amérique latine aujourd'hui,

il nous est impossible de le faire sans tenir compte de certains termes tels que: culture, inculturation, religiosité populaire, piété populaire. Cependant, les réalités

cachées derrière chacun de ces mots ont été étudiées, analysées, mais,

elles sont surtout aujourd'hui le résultat d'une expérience accumulée à travers l'histoire; et l'histoire elle-même, avec ses fluctuations constantes, a déterminé son sens et la place qu’elles occupent.

Dans le document final de la V Conférence, le mot culture apparaît environ 70

fois, et cela diffère totalement de ce qui était compris lors de la tenue de la première assemblée de l'épiscopat latino-américain dans la décennie des années 50.

Aussi la réalité de la religiosité populaire a une incidence et une résonance positive qui diffère grandement de ce qui pouvait être perçu lorsque ce même terme est apparu dans les premiers écrits de l'Église latino-américaine.

 

 

 

 

 

 

Nous ne pouvons pas parvenir à une compréhension complète si nous ne les lisons pas à la lumière de l’histoire qui les forge, leur donne la dimension qu’ils ont aujourd’hui. On ne peut pas comprendre l'évolution de l'Église latino-américaine sans tenir compte des changements sociaux et politiques qui se sont produits à partir des années soixante.

À la fin du Concile de Trente en 1563, l'Amérique avait déjà reçu des centaines de

missionnaires ; on assistait à la grande controverse soulevée par Bartolomé de las Casas sur les méthodes d'évangélisation et de conversion ; il y avait une trentaine de diocèses et on avait tenu plusieurs conseils locaux et provinciaux pour discuter du projet missionnaire américain. Ces quatre siècles ont été fermés par Vatican II.

 La diversité des situations et des cultures dans lesquelles vivaient les différentes Églises, telles que les chrétientés européennes paralysées, les Églises orientales, les communautés en Inde, au Japon et en Chine, les jeunes églises en Afrique et les catholicismes populaires en Amérique latine entre autres, a été mise en évidence.

 

 

 

Pour la première fois, ces thèmes sont entrés «par la grande porte » et ont donné à nos Eglises particulières une nouvelle lumière pour faire face à des problèmes anciens et entamer un dialogue culturel, en nous-mêmes et avec l'extérieur. " Avec prudence et amour, à travers le dialogue et la collaboration avec les adeptes d'autres religions, toujours témoins de la foi et de la vie chrétienne, reconnaître, maintenir et développer des biens spirituels et moraux, ainsi que les valeurs socioculturelles qui s'y trouvent » (Nostra Aetate 2 ).

Ailleurs, Vatican II redécouvre l'importance des charismes à l’intérieur de l'Église (Lumen Gentium, 12), et exhorte également à discerner les signes des temps

(Gaudium et Spes, 4; 11; 44). Le Concile représente une ouverture au dialogue avec la monde contemporain, une certaine réconciliation avec une modernité éclairée et une récupération de la dimension prophétique de l'Église envers la société. Avec cette lumière que le Concile a apporté, il est possible de comprendre ce que l'Église

en Amérique Latine, a réussi et vécu au cours des dernières décennies.

 

 

 

  1. Medellin

 

 

 

Malgré tout on doit présenter un éventail des problèmes, la pauvreté et la nécessité de liberté qui ont été ceux qui ont attiré l'attention de l'Amérique latine et des Caraïbes dans l’après Concile.

La révolution cubaine de Fidel Castro, la tentative de mise en œuvre du développement, les mouvements sociaux populaires au Pérou, au Chili, en Bolivie, au Mexique commencèrent à changer le panorama de l'Amérique latine à la suite de la tentative manquée de "Che" Guevara d'étendre la révolution à toute l'Amérique latine à partir de la Bolivie. Tel est le contexte dans lequel a été célébrée en 1968 la II Conférence des évêques d'Amérique latine. Medellín n'était pas seulement une application du Concile à l'Amérique latine, mais une relecture créative de Vatican II à partir d'un monde de pauvreté injuste, avec des structures économiques et sociales de péché. L'Église en Amérique

Latine commença à essayer de comprendre et de découvrir sa mission à partir du cri de ses pauvres, la souffrance du peuple, des peuples autochtones, des femmes, des travailleurs, des paysans, des enfants.

Bien que la question culturelle n'ait jamais été abordée directement à Medellín, toutes les réflexions étaient teintées de la couleur que la réalité sociale donnait à la culture.

La II Conférence de l’épiscopat latino-américain a opté en faveur de l’énorme masse des déshérités de ce continent et a investi une grande partie de ses énergies dans la constitution d’une «Eglise qui née du peuple», un lieu de rencontre des plus pauvres pour l’écoute et la compréhension de la parole de Dieu à la lumière de la conscience de la réalité de tous les jours.

C’est grâce à l’option pour les plus pauvres que des églises particulières sont arrivées à un contact plus direct avec la réalité religieuse et culturelle à multiples facettes de ce continent. A donner aux pauvres la possibilité de prendre leur place et de prendre la parole, on a redécouvert une église cachée, composée pour mémoire de plus de 2600 peuples autochtones, avec leurs innombrables langues et traditions, plus deux millions de descendants d'Africains. Il était inévitable que les expressions culturelles de ces énormes segments de la population ne soient pas introduits dans les liturgies.

Medellín a été si important pour l'Amérique latine et même pour l'Église universelle,

qu'en 1974, le président du CELAM , Eduardo Pironio, s'est rendu à Rome pour la

Synode sur l'évangélisation, il apportait trois suggestions pastorales qui eurent une

influence plus tard sur la célèbre exhortation apostolique de Paul VI, "Evangelii

Nuntiandi ". Les trois suggestions étaient les suivantes : les communautés ecclésiales de base, le thème de la libération et la religiosité populaire.

 

 

 

  1. Puebla

 

 

 

La conférence de Puebla se trouva entraînée dans le bouillonnement du processus de "restitution de la parole » aux pauvres. Les communautés ecclésiales de base et les mouvements populaires de libération, considéraient que seul un changement social assumé par les masses était possible et que cela impliquait parler leur langage. Cette conception, avec ses lumières et ses ombres, a contribué à la rencontre de l'Église avec les cultures indigènes autochtones et celles afro-américaines d'une manière plus explicite.

À Puebla, la question culturelle est entrée par la porte de la religiosité populaire et a investi les thèmes traités à l'occasion des commémorations des 500 ans qui ont culminé à Santo Domingo. Puebla est largement consacré à la réflexion sur la religiosité populaire. Mais sa réussite fut seulement de voir une telle religiosité comme une réalisation imparfaite du « substrat catholique radical » de ce continent.

Depuis 1989, le panorama social et ecclésial change beaucoup. Avec la chute du socialisme à l’Est, le néolibéralisme est présenté comme la seule voie de salut, l’émergence du courant culturel de la postmodernité marque un changement d'horizon de la conscience sociale et ecclésiale d'Amérique latine.

 

 

 

 

 

 

  1. Saint-Domingue

 

 

 

La IVe Conférence des évêques d'Amérique latine se tint à Saint-Domingue

en 1992. On s’interroge sur la marche de l'Église en Amérique latine. Le défi d'inculturer l 'Evangile dans la société permet aux laïcs de réduire leur champ d'action intra-ecclésial, en les exhortant à «pénétrer les environnements socioculturels et d’en faire les protagonistes de la transformation de la société à la lumière de l'Évangile ». Les laïcs doivent cesser d'être des "chrétiens de sacristie" dans chacune de leurs paroisses et doivent assumer leur engagement à développer les politiques, l'économie, le travail, la culture et l'environnement.

Dans cette toile de fond, cependant, les conditions d’une vision moins étroite de la réalité des cultures latino-américaines s’établissent. On discute "L’Unité et la pluralité des cultures indigènes, afro-américaines et métisses" et on fait un pas dans cette direction en reconnaissant notre "continent multiethnique et multiculturel", avec une "vision du monde de chaque peuple""qui recherchent cependant d’une unité à partir de l’identité catholique » (SD 244) . En conséquence, la pluralité culturelle et sociale est toujours acceptée ce qui n'implique pas une pluralité religieuse.

 

 

 

Les conclusions de Santo Domingo découvrent une plaie qui reste ouverte dans les relations entre les églises chrétiennes et les traditions ancestrales des peuples américains : la recherche et la préservation de "l'identité catholique" semblent entrer conflit avec le défi du dialogue œcuménique et du dialogue interreligieux.  La commission 26, qui se réunit tout au long de la rencontre, affirme que « l’action ininterrompue de Dieu à travers son Esprit, dans toutes les cultures » ( 225-1), signifie que l'inculturation est  « un processus développé à partir l’intérieur de chaque peuple et communauté »(225-1). Dans la version définitive du document, il est admis de "promouvoir une inculturation de la liturgie, accueillant avec satisfaction ses symboles, rites et expressions religieux compatibles avec un sens clair de la foi, en maintenant la valeur des symboles universels et en harmonie avec la discipline générale de l'Église ».

 

 

 

LA CULTURE À APARECIDA

 

 

 

Il ne fait aucun doute que la nouvelle approche de la réalité latino-américaine utilisée

à Aparecida, a privilégié le concept de culture comme clé d'interprétation importante. Une approche très variée du sujet a été faite mais aucune définition concise du terme n'apparaît, mais nous trouvons certaines caractéristiques particulières de ce concept, déterminé par la lecture qui a été faite de la réalité.

[…] Au milieu de la réalité du changement culturel, de nouveaux sujets émergent, avec de nouveaux modes de vie, de nouvelles façons de penser, de ressentir, de percevoir et de nouvelles formes de relations. Ce sont des producteurs et des acteurs de la nouvelle culture » ( 51).

 

 

 

C'est un concept dynamique qui implique de parler des sujets, qui produisent

et qui agissent sur les façons de se comporter et les représentations et marquent ce qui les entoure. Ce type de connexion provoque un changement constant dans la société. Les

éléments produits dans la culture se contamine les uns les autres, développant ainsi de nouvelles formes d'expression et de décision chez les individus.

 

 

 

Aparecida souligne que le phénomène social se manifeste avec une grande

complexité. Il y a des situations qui sont reconnues comme indignes de l'être humain, et il faut découvrir comment le christianisme interagit face à ce phénomène. L'Église n'est plus conçue en dehors de la production de sens, mais comme l'un des acteurs de ce processus. Elle n'est pas située à partir d’une position critique, mais en tant que participant actif à ce détermine la configuration des espaces collectifs. Ce positionnement évite la tentation pour l'Église d’être considérée comme une réalité hors de la société et de ses contradictions. L'Église est productrice de culture, c'est-à-dire de comportement humain et promoteur de processus. Il n'est qu'une partie du large spectre, elle n'est pas le seul acteur. La capacité de son influence est mise à l'épreuve par le défi de convaincre aujourd'hui de la possibilité du projet chrétien, comme un projet qui réalise pleinement l'homme et l'histoire concrète dans laquelle il se développe chaque jour.

L'un des tréfonds d'Aparecida est la conscience de la responsabilité que nous devons montrer : la Bonne Nouvelle de Jésus est un moyen efficace de salut. Cela implique comme contrepartie la nécessité de découvrir et de reconnaître le rôle qu'a joué et doit jouer l'Église face aux réalités douloureuses et injustes qui affectent une grande partie de la société. Aparecida a trouvé un divorce entre la foi et la pratique sociale concrète des croyants, malgré le fait que de nombreux croyants aient pris d’importantes options de solidarité d’envergure. C'est au monde laïc d’avoir la tâche principale de témoigner de la présence de Dieu dans l'engagement de transformer les structures sociales.

«La cupidité du marché ne contrôle pas le désir des enfants, des jeunes et des adultes. La la publicité mène de façon illusoire à des mondes lointains et merveilleux, où tout ce que je souhaite peut être satisfait par des produits qui ont un effet efficace, éphémère et même messianique. On légitime que les désirs deviennent bonheur. Seul, ce qui est le nécessaire immédiat, le bonheur, doit être atteint grâce au bien-être économique et la satisfaction hédoniste. " (DA 50).

La cause fondamentale de cette rupture est une perception de la réalité liée

absolument avec une satisfaction particulière. Ceci est certainement encouragé par les communications sociales lorsqu'elles sont gérées selon les exigences du marché. La conception du bonheur comme la satisfaction du désir est placée au centre des besoins humains. Ce n'est rien de plus que l'autoréférentialité d'un narcissisme de base. Cela s’oppose frontalement aux diverses situations de marginalisation et de souffrance qui se produisent sur le continent. Les nouvelles générations, grandissant dans la logique de l'individualisme pragmatique et de « l'égomaniaque », sont les plus touchés par ces changements. Pour eux, le passé n'est pas une chose manquée et l'avenir est incertain. Atteindre un maximum de satisfaction est la référence de la réalité actuelle leur permet d'oublier momentanément les grands conflits et les souffrances de l’insécurité. On vit dans un monde où les conditions de la plus grande abondance ont permis de générer un système de comportement social insouciant.

Cependant, la racine de cette indifférence à la vie sociale se trouve marquée par la puissance de la désillusion à laquelle il faut ajouter le phénomène de

 

 

 

la mondialisation, en particulier dans son aspect économique, qui touche tous les secteurs et met en danger les moyens de subsistance de nombreuses personnes et, en même temps, ouvre à l’influence de nouveaux usages et coutumes qui génèrent des idées syncrétiques et des comportements ambigus, qui se heurtent aux façons de voir et de ressentir des personnes qui ont grandi dans un contexte culturel différent. Ces chocs ont structuré la nouvelle la société, qui a fait du changement une réalité permanente.

Tout cela nous aide à comprendre que la vie ecclésiale est confrontée à une

une série de défis importants, devant lesquels le document fait le choix d’une vie de foi, et

où la richesse humaine de la proposition évangélique doit être mise en évidence. La communauté de foi – qui lie les personnes d’une manière nouvelle et qui par là même se convertit en espace contre-culturel – s’oppose à une conception de la vie sociale qui met en son centre, la consommation comme chemin sûr et assuré pour l’accès au bonheur. Depuis longtemps nous assistons à une sorte de « colonisation culturelle par l’imposition de cultures artificielles qui déprécient les cultures locales et cherchent à imposer une culture homogénéisée qui conduit à l’indifférence de l’autre, à celui dont on a pas besoin et envers lequel on a aucune responsabilité (DA 46) . L’affirmation exacerbée des droits individuels et subjectifs est accompagnée d’un côté par l’absence de travail responsable pour les droits sociaux et culturels solidaires et de l’autre elle conduit à l’effacement de la dignité de tous spécialement celle des plus pauvres et des plus nécessiteux.  Dans cette situation culturelle, le plus grand défi est dans un dialogue empathique avec les différentes composantes de la culture afin qu'elle devienne un véhicule efficace pour se rapprocher de Jésus.  Le manque de réflexion critique et de discernement peut conduire au subjectivisme religieux fondamentaliste ou au syncrétisme chrétien superficiel et délavé. En ce sens, l'Assemblée d'Aparecida a marqué de façon décisive le besoin de formation pour tous les fidèles, non comme un endoctrinement, mais comme un approfondissement du chemin de la foi, qui doit nécessairement aller de pair avec le processus humain de croissance personnelle.

 

 

 

CULTURE ET INCULTURATION

 

 

 

S'appuyant sur le Concile, un concept subjectif de la culture comprend toute recherche personnelle de l'homme, dans ses qualités spirituelles et corporelles (GS 53). Un concept objectif de la culture comprend la culture de trois relations humaines de base : relation avec la nature, pour la modifier, la dominer et d'en retirer des biens de consommation et de service; relation avec l'homme, pour rendre la coexistence plus humaine, à travers l’ amélioration des coutumes et des institutions; relation avec Dieu à travers pratique religieuse (GS 53) : l'attitude selon laquelle un peuple affirme ou nie une relation religieuse avec Dieu est essentielle pour toute culture, à cause des valeurs ou des anti valeurs que cela entraîne. (Puebla 386, 389)

Un concept sociologique (ethnologique) découvre une pluralité de cultures dans l’

histoire, divers modes de vie commune (GS 53), avec différentes échelles de valeurs, différentes façon de travailler, d'utiliser les choses, de s'exprimer, de pratiquer la religion, d'établir lois et institutions juridiques, pour créer de l'art et cultiver la beauté. Que cette culture soit l'héritage de chaque communauté demeurera explicite dans les réflexions de Puebla .

 

 

 

 

 

 

ÉVANGÉLISER LA CULTURE

 

 

 

Pendant le chemin parcouru, un moment décisif a été le Synode des évêques sur

l'évangélisation, qui a été célébré à Rome en 1974 et a abouti à l'exhortation apostolique de Paul VI (8 décembre 1975), "Evangelii Nuntiandi". Ce document était ce qui a guidé tous les travaux de la III Assemblée générale de l'épiscopat latino-américain célébrée à Puebla, en février 1979.

Ainsi pour la première fois dans l'histoire, le sujet de la culture est entré dans l'enseignement formel du Magistère de l'Église selon les documents de Vatican II avec l'affirmation de "Gaudium et Spes" qui soutient que l'homme n'atteint pas un niveau d’épanouissement si ce n’est par le moyen de la culture (GS 53) qui a une valeur propre et une autonomie légitime (GS 55 : AA7) grâce à la culture. Cela apparaît seulement dans Evangelii Nuntiandi avec le thème de l’Evangélisation de la culture et des Cultures, affirmant l’indéniable rupture entre l’Evangile et la Culture y les cultures, face au drame de notre temps, affirmant l’indéniable rupture entre Evangile et Culture.

 

 

 

Le pape et Puebla enseignent qu’évangéliser c’est évangéliser les cultures alors « la Bonne Nouvelle doit atteindre toutes les limites et transformer depuis l’intérieur la conscience personnelle et collective de l’homme (EN 18), les valeurs et les modèles de vie de l’humanité qui ne sont pas en accord avec le dessein de salut de Dieu (EN 19). Ce qui est important c’est évangéliser la culture et les cultures de l’homme, en partant de la personne considérée en elle-même et dans ses relations avec les autres et Dieu. (EN 20).

Puebla a consacré une large place à ce thème, (n.388-56) affirmant qu’évangéliser c’est arriver aux racines des Cultures, transformer les structures et l’environnement social, fortifier les valeurs authentiques des cultures, contribuer au développement des « semences de verbe », purifier les valeurs, séparer les idolâtries et les valeurs absolutistes, corriger les fausses conceptions de Dieu et les manipulations de l’homme contre l’homme.

Comme point spécifique de l’évangélisation de la culture en Amérique Latine on doit signaler la purification et la dynamisation par l’Evangile, le Catholicisme populaire (Puebla 457) ainsi que la promotion de la personne humaine selon la doctrine sociale de l’Eglise pour libérer de l’esclavage du péché personnel et social, et atteindre une convivialité digne des fils de Dieu. (472-506)

Puebla a développé la réflexion sur la culture de Gaudium et Spes, assimilé la proposition de Evangelii Nuntiandi sur l’évangélisation de la culture et la transformer en programme pastoral pour l’Eglise en Amérique latine : l’Evangile doit pénétrer les valeurs et les critères qui inspirent nos cultures. (Puebla 395)

Il y a dans toute l’Amérique latine « un substrat catholique » (n.7) « une culture imprégnée de foi » qui se manifeste dans les attitudes religieuses du peuple. (n.413) La religiosité populaire contient un ensemble de valeurs qui répondent avec sagesse aux grandes interrogations de l’existence (n.448) mais elles sont aujourd’hui menacées par l’urbanisation et le sécularisme et les structures d’injustice qu’on leur imposent. (n.37)

L’importance que Puebla accorde aux structures socio-économiques en tant qu’élément de la culture et objet d'évangélisation, constituent une grande contribution et une avancée pour le concept de la culture de GS et les défis de l'évangélisation que souligne « Evangelii Nuntiandi».

 

 

 

INCULTURATION DE LA FOI

 

 

 

D'un point de vue sociologique, l'expression "inculturation" désigne "le processus de

transmission et de communication par codes, à la fois linguistiques et iconiques, de

valeurs, normes de vie et lignes directrices comportementales d'un certain groupe socio-économique culturel aux nouvelles générations qui surgissent. C’est le processus par lequel l'individu reçoit, assimile, réinterprète et assume activement la culture dans laquelle il est né ou dont il commence effectivement à faire partie »(A. Do Carmo Cheuiche, Marco de référence actuelle sur le problème de l'inculturation, à Medellín 60).

 

 

 

L'inculturation a toujours été pratiquée par l'Église depuis ses débuts, dans son

travail missionnaire. Saint Paul l'a mis en pratique dans le monde grec et romain (« Je me suis fait tout à tous pour annoncer la bonne nouvelle » 1 Co 9,22-23). Le travail des grands missionnaires de tous les temps a été encadré par le processus d'inculturation. Les frères Cyrille et Méthode ont apporté la lumière de l'Évangile aux peuples slaves et ils ont préparé les textes liturgiques selon la mentalité et la langue slave: "Utiliser la connaissance de la langue grecque elle-même et la culture pour

un travail ardu et singulier, ils se préfixèrent la tâche de comprendre et de pénétrer la langue, les coutumes et les traditions des peuples slaves, en interprétant fidèlement les aspirations et les valeurs humaines qui subsistaient et qui s'y exprimaient » Encyclique Slavorum Apostol, 2 juin 1985). Les apôtres jésuites de Chine, Matteo Ricci et Martino Martini au 17ème siècle ont pu intégrer les rites chinois et malabars dans la liturgie catholique. Dans la région du Paraguay lors de la première évangélisation, le franciscain Luis Bolaños a écrit la première grammaire, le premier dictionnaire et un livre de sentences en guaraní ; puis le bienheureux José de Anchieta de la Companíe de Jesús a étudié la langue Tupí et a composé la première grammaire de cette langue, avec un catéchisme, de la poésie et des hymnes pour l'évangélisation.

Lorsque Puebla indique certains critères pour assumer les cultures, il parle d'une

incarnation (n. 400), mais ne développe pas le problème de l'inculturation de l'Évangile. C’est Jean-Paul II qui a officiellement recueilli dans la lettre apostolique Catechesi tradendae de 1979 le terme "inculturation" et le consacre en déterminant son sens et en lui donnant une portée universelle. Ce sera l'un des sujets que vous aborderez le plus fréquemment lorsque vous aborderez l'évangélisation, en la montrant comme un aspect important de celle-ci. Dés, les premiers mois, au début de son pontificat, le 27 avril 1979, il a déclaré que "l'inculturation est une composante de l'Incarnation ". C'est-à-dire que l'inculturation de la foi et de l'Évangile sont une conséquence pratique de l'Incarnation du Fils de Dieu, qui a tout sauvé et seulement ce qui est assumé ("quod non est assumptum non est redemptum", Saint Irénée) : l’Eglise doit assumer toutes les cultures en les purifiant ou en éliminant ce qui est contraire à son esprit, mais en les préservant de toute autodestruction. L’inculturation est la pénétration du message évangélique dans les cultures selon la manière même suivant laquelle la Parole s’est faite chair et il est venu habiter parmi nous. (Jean ,1, 14).

Dans l’encyclique Redemptor Hominis de 1979 le pape commence par un discours anthropologique sur l’homme. L’homme, dans la plénitude de son être personnel est à la fois communautaire et social : c’est le chemin obligatoire que doit parcourir dans l’accomplissement de sa mission… chemin tracé par le Christ lui-même qui invariablement apporte la semence de l’Incarnation et de la Rédemption. (n.14) Parlant à l’UNESCO à Paris en 1980, il expose qu’il « faut affirmer l’homme pour lui-même », non pour un autre motif ou une autre raison, uniquement pour lui-même. Il continue en exposant : « l’homme vit une vie véritablement humaine grâce à la culture : par elle l’homme en tant qu’homme devient plus homme. Dans une allocution devant les fidèles à Bergame en 1982, parlant de la culture chrétienne et de l’évangélisation de la culture, le pape signale comme axes fondamentaux qui guident tout son Magister : un sain concept anthropologique de culture et un concept théologique d’inculturation de l’Evangile.

C’est à travers la culture que l’Evangile peut s’approcher de l’homme, à cet homme qui es le principe, le moyen et la fin de la culture « La culture fait l’homme et l’homme fait la culture”) (Juan Pablo II en la Université de Coimbra, Portugal).

Entre christianisme et culture il y a une connexion inséparable, harmonique, comme celle qui a toujours existé entre religion et culture. Pour que l’Evangile s’approche de la culture et à travers elle de l’homme, l’Evangile doit connaître le langage et les catégories mentales de la culture qu’elle rencontre, ses formes de vie, ses valeurs. Ainsi elle pourra les intégrer dans la foi chrétienne et les transformer progressivement jusqu’à arriver à une incarnation vitale dans cette culture. L’Inculturation c’est également le processus par lequel la foi se fait culture. Dans un tel processus la fidélité à l’expérience historique de Dieu se fait indispensable dans le contexte d’une détermination culturelle particulière, fidélité à la tradition apostolique et fidélité à la communion ecclésiale universelle. L’inculturation ne peut jamais être réduite à un seul terme de cette triple fidélité. Souvent, faute de clarté il y eut des cas d’impositions ou d’adaptations superficielles dont les résultats négatifs ont été déplorés par Paul VI dans Evangelii Nunutiandi. De ces exemples concrets, imposés et épidermiques de l’annonce évangélisatrice, les Eglises locales ne sont pas nées fautes d’être capables de transformer son environnement culturel et d’être missionnaire dans une dynamique. Mais au contraire le résultat a été de cas d’une christianisation superficielle ou qui a provoqué une sorte de syncrétismes.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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L'Église, dans son désir de promouvoir une évangélisation authentique à partir d'une saine inculturation de l'Évangile dans une pluralité de cultures, fait face au défi de concevoir de sages et de nouveaux outils et des structures créatives pour comprendre la réalité, pour un dialogue interculturel, une réflexion et une formation théologiques, et de communion collégiale pour sauvegarder et activer chacun des termes de cette action.

Le salut doit parvenir à tous les hommes et à tous les hommes dans leur vie quotidienne et concrète, c'est pourquoi l'Évangile, lorsqu'il entre en contact avec les Cultures, incorpore ses valeurs authentiques et finit par créer une culture : "Une foi qui ne devient pas une culture est une foi qui n’est pas pleinement accueillie, pas entièrement pensée, pas fidèlement vécue ", a déclaré le Pape à Rome, en 1988. La foi incorpore des hommes concrets dans le peuple de Dieu, et cela doit être fait sans les déraciner de leur propre peuple et culture. Toute l'action de l'Église tend à

 

 

 

Accueillir en son sein ceux qui veulent être disciples de Jésus-Christ et doit les accompagner sur le chemin de la vie qu'ils font jour après jour avec tout leur bagage culturel vécu en communauté. Il y a une réciprocité constante entre l'évangélisation d'un peuple et l'inculturation de l’Evangil e; mais pour que ce lien soit fructueux, il est essentiel de rendre ce lien capable de culture, d'exprimer manifestement les signes de la foi et d'être encouragés à entrer dans le processus de purification des traditions et des formes incompatibles avec l’Evangile. C'est aussi à l'Église de se rendre capable de pouvoir assimiler les valeurs de ce Peuple et de comprendre comment l'Evangile est reçu. Ce juste équilibre, ne signifie pas qu'il n’y ait pas de fluctuations ; il sera possible de communiquer le message évangélique à un peuple avec toute l'authenticité et la force de la parole de Dieu, mais aussi avec toute l'authenticité et la force de la réalité culturelle et l'être même de ce peuple.

 

 

 

Un autre moment important pour l'évolution de cette pensée aura lieu lors

de la célébration de la IVe Conférence générale de l'épiscopat latino-américain

dont l'axe sera le thème "Nouvelle évangélisation promotion humaine-culture-chrétienne".

Le chapitre III de la 2e partie du document de Saint-Domingue traitait du thème de la Culture Chrétienne qui contient des informations abondantes sur l'inculturation et l'évangélisation inculturée. (n 248).  La crise de la disparition des valeurs humaines et chrétiennes apparaît alarmante, et un moyen d'attaquer ce défi est l'inculturation de l'Évangile, à la lumière des trois grands mystères du salut : Noël (Incarnation), Pâques (souffrance rédemptrice) et Pentecôte (action de l'Esprit qui nous conduit à comprendre dans notre propre langue les merveilles de Dieu). Une évangélisation inculturée doit être offerte aux frères indigènes, en respectant leurs expressions culturelles, en apprenant leur vision du monde qui, de la globalisation DIEU-HOMME-MONDE, fait une unité qui imprègne toutes les relations humaines, spirituelles et transcendantes. On doit recevoir avec estime les expressions religieuses, symboles et rites compatibles avec le véritable sens de la foi . La culture moderne (n.252-254) et la ville exige une nouvelle pastorale. (255ss).

Dans l'encyclique "Redemptoris Missio", Jean-Paul II montre qu’à l’approche du troisième millénaire, il y a nécessité urgente de porter l’Évangile à tous les peuples. Depuis la fin de Vatican II et à 25 ans du décret conciliaire "Ad gentes" le nombre a presque doublé de ceux qui ne connaissent pas le Christ. Dans l'exhortation apostolique "Ecclesia in Africa" ​​de 1994, il est dit que les voies de la Mission seront : le témoignage de la vie chrétienne, le kérygme ou l'annonce du Christ crucifié, mort et ressuscité, la conversion et le baptême, la formation des communautés chrétiennes, l’inculturation ou processus d’insertion dans les cultures des peuples, le dialogue avec les autres religions, l’éducation des consciences pour promouvoir le développement. Tout ce programme devra être motivé par l’amour.

 

 

 

Inculturer c’est transformer intimement les authentiques valeurs culturelles en valeurs chrétiennes, les intégrer dans une même vision de la vie, et à chaque fois enraciner le christianisme dans les diverses cultures après réflexion et praxis. Ce n’est pas un processus facile, cependant on ne peut en aucune façon diluer les caractéristiques et l’intégralité du message chrétien. Inculturer c’est incarner l’Evangile dans les diverses cultures, transmettre les valeurs, reconnaître les valeurs des diverses cultures, de soins prudents, et par-dessus tout une écoute sapientielle pour les purifier, éviter les syncrétismes ? Cela nécessite des périodes de préparation cultures diverses, les purifier, éviter les syncrétismes. Cela nécessite des périodes de préparation, de soins prudentiels mais surtout d'écouter la sagesse des voix de l'Église Universelle, de tout le peuple chrétien. C’est par la

réflexion et l’expérience du peuple chrétien que le véritable sens de la foi est atteint.  Participent à ce travail, pasteurs et fidèles, et tout le peuple de Dieu. (Cfr Lumen Gentium 12).

 

 

 

C’est pourquoi l’inculturation de la foi ou l’évangélisation de la culture est encadrée par la logique du mystère de l'incarnation, de la mort et de la résurrection. Cela commence par un effort pour exprimer la foi dans les catégories et les modes de cette culture, dans une tentative d'incarnation.

Dans la deuxième étape, l'Évangile réalise un discernement de cette culture afin qu'elle se dépouille de ce qui en elle s’y oppose. De la mort d'éléments non compatibles et donc non assimilable, ressuscite une nouvelle culture chrétienne originale. Chaque culture est le produit de l'homme par conséquent elle sera donc marquée par le péché : aussi la culture doit être purifiée, élevée, perfectionnée (Encyclique Redemptoris Missio 54).

En 1994, dans la lettre apostolique "Tertio millenio adveniente" le pape Jean-Paul II (n. 38) annonce deux Synodes continentaux : un pour les Amériques, si différentes dans leur l’histoire et leur situation sociale, et un autre pour l’Asie, avec la réunion du christianisme avec les plus anciennes cultures et religions locales.

 

 

 

L'Église existe pour évangéliser (EN 14) et l'évangélisation à pour objet

"transformer de l'intérieur, renouveler l'humanité elle-même." L'inculturation est proposée comme une priorité et une exigence d'évangélisation, un chemin vers la pleine évangélisation, le grand défi aux portes du troisième millénaire (EA 59).

L'inculturation prépare l'homme à accueillir Jésus-Christ dans l'intégrité de son

être personnel, culturel, politique, économique, sanctifié par l'action de l'Esprit (EA 62). Ce n'est pas une simple adaptation du kérygme ou de la liturgie, ni une tactique pour rendre le christianisme plus attractif, même au prix d’une mutilation de la Révélation. C'est une catéchèse patiente et une recherche amoureuse de ces "semences du Verbe" qui, lorsqu'elles mûriront, produiront les fruits d'une civilisation de l'amour. Elle englobe les domaines de la vie de l'Église : la théologie, la

liturgie, la vie et la structure de l'Église dans sa double dimension, celle de transformer les authentiques valeurs culturelles en les intégrant au christianisme, et celle d'enraciner le christianisme dans les différentes cultures humaines (Redemptoris Missio 52).

 

Un aspect important de l'évangélisation inculturée est la découverte de l'homme dans

le sens de la dignité humaine retrouvée. Dieu rend à l'homme sa dignité inaliénable

de personne et de fils de Dieu à travers l'Incarnation de son Fils unique. Ce ministère de l'évangélisation dans le domaine social, dénonce et combat tout ce qui avilit et détruit l'homme, cela fait partie de l'inculturation de l'Évangile (EA 7O).

 

 

L'INCULTURATION COMME ACTION DU SAINT-ESPRIT

 

 

 

Par l'inculturation, l'Église incarne l'Évangile dans les différentes cultures et, en même temps, introduit les peuples avec leurs cultures dans sa communauté ; elle leur transmet ses propres valeurs, en assumant ce qui est bon en elles et

les renouvelant de l'intérieur "(RM 52).

"L'inculturation constitue un chemin vers la pleine évangélisation afin que

chaque homme puisse accueillir Jésus-Christ dans l'intégrité de son être personnel et culturel, économique et politique, en vue de son union pleine et entière avec Dieu le Père et une vie sainte sous l'action du Saint-Esprit " (EA 62).

 

 

 

Pour pénétrer et faire fermenter les façons de penser avec le levain de l'Évangile,

pour faire ressentir et agir à partir d'autres cultures, l'action de l'Esprit Saint est nécessaire et essentielle. C’est lui qui anime l’histoire et qui peut la conduire jusqu’à « la nouvelle création ». (Apoc. 21,5).

 

 

 

C’est ce même Esprit qui a été présent à l’Incarnation, dans la vie, et la Résurrection de Jésus, qui agit dans l’Eglise. Tout ce que l’Esprit fait dans les hommes et dans l’histoire des peuples a un rôle de préparation évangélique et on ne peut pas ne pas se référer au Christ, Verbe Incarné par l’œuvre de l’Esprit, « par lequel l’homme parfait, Sauveur de tous, qui récapitulera toutes choses ».

 

 

 

L’inculturation est également liée de façon profonde au mystère de la Pentecôte grâce à l’effusion et à l’action de l’Esprit qui unifie les dons et les talents. Tous les peuples de la Terre qui entre dans l’Eglise vivent une nouvelle Pentecôte Ils professent dans leur propre langue l’unique foi en Jésus Christ et proclament les merveilles que le Seigneur a réaliser pour eux. L’Esprit qui, au plan naturel est la source originelle de la sagesse des peuples, les guide avec une lumière surnaturelle vers l’Eglise jusqu’à la connaissance de toute la vérité. A son tour l’Eglise, assumant les valeurs des diverses cultures, se fait « l’épouse ornée »,«  la fiancée qui se pare de ses joyaux » ” (cf. Is 61, 10. Iglesia en África 61).

« L’événement de ce jour a été certainement mystérieux, mais aussi très significatif ». Nous pouvons découvrir en lui un signe de l’universalité du christianisme et du caractère missionnaire de l’Eglise ; l’hagiographe nous la présente consciente de ce que le message est destiné aux hommes de « toutes les nations », et que de plus, c’est l’Esprit Saint qui intervient pour faire que chacun comprenne au moins quelque chose dans sa propre langue : « Nous les entendons dans notre propre langue (Hch 2, 8). Aujourd’hui nous parlerions d’une adaptation aux conditions linguistiques et culturelles de chacun. Pour autant nous pouvons voir en tout cela une première forme d’«inculturation », réalisée par l’action de l’Esprit Saint. (Audience générale Mercredi 20 septembre 1989).

 

 

 

La révélation de Dieu ne peut pas ne pas être inculturée, mais les cultures sont différentes et changeantes comme l’homme à travers son histoire ; grâce à cela seulement la Bonne Nouvelle sera vivante, sous l’action de l’Esprit qui fait que la parole de Dieu résonne avec une force salvatrice, elle interpelle et annonce en langage approprié pour que l’homme puisse la recevoir dans les circonstances de sa vie propre. L’Esprit est celui qui assiste pour que soit respectée la pluralité des expressions de la foi. Sous l’action de l’Esprit l’autocommunication de Dieu s’illumine selon les circonstances changeantes. Il est évident que les diverses transculturations du message vont enrichir progressivement leur compréhension De plus l’intelligence du mystère révélé va croître, se transmettre et s’expérimenter, l’Esprit nous conduisant à la pleine vérité.

 

 

 

 

 

 

INCULTURATION ET RELIGIOSITE POPULAIRE

 

 

 

L’inculturation de la foi est une des questions prioritaires dans l’Eglise aujourd’hui.

 «La synthèse entre culture et foi n'est pas seulement une exigence de la culture, mais de la foi.  Une foi qui ne se fait pas culture, c'est une foi qui n'est pas pleinement acceptée, ni totalement pensée ni fidèlement vécue. »(Jean-Paul II. Lettre par laquelle il institue le Conseil pontifical de la Culture). La foi n'est pas une idée, une philosophie ou une idéologie. La foi procède d'une rencontre personnelle avec Jésus-Christ, le Fils de Dieu fait chair. La personne qui découvre l'amour de Dieu dans sa vie n'est pas la même qu'avant. Et un peuple qui croit au Dieu vivant et vrai, Jésus-Christ, et le suit, est un peuple particulier. Pour cette raison, la religiosité populaire est la foi des gens simples, qui devient vie et culture ; c’est la façon particulière que les gens ont de vivre et d’exprimer leur relation avec Dieu, avec la Vierge et avec les saints, dans l'environnement privé et intime et aussi en communauté d'une manière spéciale.

 

 

 

Pour valoriser positivement la religiosité populaire, nous devons partir d'une anthropologie radicalement pleine d'espérance. L’homme doit être défini par son ouverture à la transcendance. Il faut partir d’une anthropologie qui considère l’homme comme une unité corps-esprit, ouverte à l'infini. L'homme découvre Dieu, à partir de ce qu’il est et dans la réalité concrète de sa vie. Le Dieu de la révélation chrétienne se manifeste dans ces réalisations, les ouvrant toujours vers leur destin transcendant.

A Puebla, on nous a parlé d’anthropologies insuffisantes et incompatibles avec la dimension religieuse de l'homme : déterminisme, psychologisme, économisme ; étatisme, scientisme…

La valorisation de la religiosité populaire part d'une conception de l'homme comme

l'être du transcendant, du sacré. L'homme est la seule créature capable d'adorer, et

et il manifeste son intelligence si il arrive à une confession de foi adoratrice. Une anthropologie chrétienne part de l'hypothèse de la dignité de l'homme et de toutes ses manifestations, dont celles qui se trouvent aussi dans toutes les expressions de la religiosité populaire.

 

 

 

La religiosité populaire est simplement la religiosité des croyants qui ne peuvent même pas exprimer leur foi chrétienne publiquement, avec une spontanéité sincère et simple, reçue de génération en génération, et qui a façonné la vie et coutumes de tout leur peuple.

 

 

 

L'Église catholique en Amérique latine, en particulier depuis Vatican II, dans son

processus d'identification historique et de retour à ses racines redécouvre positivement la religiosité qui a grandi avec elle à partir du même XVIe siècle.

 

 

 

Mais ça n’a pas été pas seulement la validation de la religiosité populaire dans la vie des peuples qui a obligé les intellectuels à la réévaluer. C'est aussi son histoire, dans laquelle s’est révélé un dépôt effectif de la synthèse culturelle fondatrice de l'Amérique latine, produit aux XVIe et XVIIe siècles, qui a gardé jalousement la variété et l'interconnexion des substrats indiens, noirs et européens.

Réévaluer la religiosité populaire, c'est réévaluer le propre passé de l'Église

ainsi que sa continuité historique parmi les hommes du peuple latino-américain.

 

 

 

 

 

 

Dans cette perspective, la religiosité populaire peut être considérée comme une des rares expressions, sans en exclure d'autres, de la synthèse culturelle latino-américaine qui a traversé toutes les époques et qui recouvre en même temps toutes les dimensions : le travail et la production, les lieux d’implantations, les styles de vie, le langage et l’expression artistique, l’organisation politique, la vie quotidienne. Et précisément dans son rôle de dépôt de l’identité culturelle elle a supporté les assauts de la modernité qui voulait soumettre les cultures particulières aux diktats de la raison.

 

 

 

Cette religiosité populaire était présente dans le catholicisme dès les premiers moments. En Amérique Latine, la doctrine apportées par les missionnaires s’est « syncrétisée » avec des formes africaines ou indigènes qui a donné place dans quelques cas à des formes mixtes très bien intégrées.

Avec le cour du temps et avec les migrations vers les zones urbaines la religiosité populaire qui était propre à la campagne s’est étendue aux villes.

 

 

 

L’épanouissement dans les grandes villes des caractères distincts de religiosité populaire répond à la nécessité de l’homme de récupérer ses racines socio-religieuses, l’ouverture naturelle à la transcendance et la recherche des valeurs spirituelles. Face à la modernisation mais plus encore à la « post modernité », une forme communautaire de résistance s’est formée, un cri prophétique de l’homme qui ne veut pas nier le mystère de la transcendance dans l’horizon de la vie. L’homme de la campagne converti en citoyen de ville, se sent arraché à sa terre et ses traditions et rejeté d’un monde dans lequel seul compte la valeur personnelle et le travail spécialisé.. Sa tendance personnelle serait de retourner à son lieu d’origine mais il ne peut le faire d’une façon réelle et il se réfugie dans ce qui symbolise son essence, sa terre, ses traditions. Cependant une religiosité populaire urbaine pourrait surgir capable d’établir un pont pour unir ce qui semble apparemment impossible. De là et avec toute la charge émotive, même si cela ne change pas la situation réelle, on arrive à nouer un lien plus intime. Entre les saints, les dévotions, la fête, on reconnaît les siens et avec ce qui l’identifie le plus profondément, il peut faire de ce lieu inamical, sa maison.

La piété populaire comme manifestation visible et sensible de la religion populaire est un modèle d’incarnation de la foi dans les réalités culturelles qui les imprègne et en même temps qui s’enrichissent mutuellement. C’est-à-dire que c’est un mode d’inculturation de la foi. C’est sensible, et émouvant ; ni abstrait, ni rationnel. On en trouve dans une typologie variée de pratiques de dévotion dans lesquelles les valeurs religieuses sont vécues à travers des symboles et spécifiquement les chrétiens qui sont reliés à différents univers culturels qui se transforment en un moyen d'auto-évangélisation. Nous ne pouvons bien comprendre la religiosité populaire que si nous reconnaissons la culture comme un faisceau de relations.

 

 

 

L'expérience de la foi propre à la religiosité populaire découle du mode de vivre réel de l’homme et se rattache à l’expression de symboles, contes, mythe, croyances et rêves. "Plus que le mot et l'analyse, il privilégie le symbole, l'action, le rite, le mythique, le mouvement, le baiser, la chanson, la musique, les silences éloquents, les danses, les bougies et les fleurs etc. ” ( Víctor Manuel Fernández . Une interprétation de la religiosité populaire.)

 

 

 

Puebla voit la religiosité populaire en Amérique latine comme « une manifestation

sapientielle intégratrice de culture et de foi: c'est un composé de valeurs qui répond à la sagesse chrétienne; c'est la sagesse populaire catholique; elle assimile de façon créative le divin et l’humain; c'est un humanisme chrétien qui affirme radicalement la dignité de chaque personne en tant qu'enfant de Dieu, il établit une fraternité fondamentale, enseigne comment rencontrer la nature et à comprendre le travail, donne des raisons de joie et d’ l'humour, même au milieu d'une vie très dure. Pour le peuple c'est un principe et un instinct évangélique de discernement » .(Puebla 448 ).

 

 

 

La religiosité populaire a un profond sentiment de transcendance et, en même temps, elle est une expérience réelle de la proximité de Dieu, elle a la capacité d'exprimer sa foi dans une langue totale qui dépasse les rationalismes avec des aspects contemplatifs, que définissent les relations avec la nature et avec le reste des hommes, et offre un sens au travail, aux fêtes, à la solidarité à l’amitié à la famille et un sentiment de joie en sa propre identité qui ne se sent pas érodée par le poids de la vie, de la pauvreté et l’humilité qu’on y rencontre.

Le mode propre de la religiosité populaire est marqué par le cœur, la foi se trouve déterminée par les sentiments. Si quelques- uns n’acceptent pas ce type de religiosité argumentant que cela n’engage pas la personne, cependant les sentiments du cœur conduise la foi à s’exprimer en gestes et en délicatesse, avec le Seigneur et avec les frères.

L’aspect sensible n’est pas contradictoire avec les expériences plus profondes de l’esprit. Et pour cela il n’est pas nécessaire de se reporter aux grands mystiques de l’Eglise Catholique comme Saint Jean de la Croix, Sainte Thérèse ou Saint Ignace de Loyola qui nous montrent cette dimension sensible de la foi. Ce serait une grande valeur qu’un échange sain et enrichissant, que la religion populaire ajouterait à une Eglise souvent tentée de rationaliser et de rester dans des pensées ou des formulations qui n’engagent pas la vie.

 

 

 

Les expressions de la religion populaire sont le « signe de l’enracinement de la foi dans le cœur des divers peuples et de son entrée dans l’espace du quotidien ». Dans ce sens, la religiosité populaire est la première et fondamentale forme de l’inculturation de la foi. ( Víctor Manuel Fernández. Pour me frayer un chemin dans ce pays. Et pour rester. La vie pastorale, 2002 ) .

Cette foi faite culture est vécue spontanément, comme une partie inséparable de la vie propre, et c'est pourquoi c'est plus qu'une série de notions : c’est féconder la foi à partir du cœur ; configurer une manière particulière de vivre et d'exprimer le dynamisme de l'Esprit. Ce n'est pas seulement les manifestations massives de piété, mais aussi les expressions religieuses qui de façon capillaire font partie de la vie quotidienne, du langage spontané et familier, que la plupart sentent comme quelque chose de lié à leur identité. Ce que chacun a en commun avec le peuple croyant en général, mais qui est en même temps très personnel. (Annuaire sur la piété populaire et la liturgie. 91)

 

 

 

 

 

L'expérience de la foi se manifeste dans les gestes quotidiens et est vécue en

commun elle conduit à l'amour de Dieu et des hommes, et aide les gens et les

peuples à prendre conscience de leur responsabilité dans la construction de

l'histoire et la réalisation de leur propre destin. La religiosité populaire contient

une série de valeurs humaines et religieuses très importantes: «elle rend capable

de générosité et de sacrifice jusqu’à l'héroïsme quand il s’agit de manifester la foi.

Elle comporte un sens profond des attributs de Dieu :la

 

 

 

paternité, providence, présence aimante et constante. Elle engendre des attitudes intérieures qui s’observent rarement à un tel degré chez ceux qui n’ont pas cette religiosité : la patience, le sens de la croix dans la vie chrétienne, le détachement, l’ acceptation des autres ; la dévotion , une soif de Dieu que seuls les simples et les

pauvres » peuvent connaître(EN 48). Du point de vue anthropologique, la religiosité populaire se manifeste par les sentiments les plus profonds, "alborales" selon M. Eliade, qui sont : proximité de la nature, contact avec la vie et de la mort ; avec le besoin de se sentir en sécurité et intégré dans la réalité complexe. Cette façon de positionner les gens montre en même temps la nécessité du salut au milieu des menaces de l’existence et celle de donner une unité à la vie à travers des symboles et des récits.

En Amérique latine, la religiosité populaire configure l'identité historique : c'est la

décantation d'une histoire d'évangélisation qui intègre de façon plus ou moins consciente une multitude d'éléments culturels et religieux de nombreux peuples, races et cultures. Dans le substrat de la religiosité populaire on trouve des contributions autochtones (rythmes, vêtements, musique, nourriture, etc.), la culture afro-américaine colorée par l'expérience de l'esclavage, la nostalgie des origines avec leurs rites de transe et de guérison, les apports du terrain rural et l'influence des couches sociales urbaines marginalisées qui se regroupent pour garder ses valeurs.

D'où "l'importance de la piété populaire pour la vie de foi du peuple de Dieu,

pour la préservation de la foi elle-même ... La religiosité populaire a été un instrument

providentiel pour la préservation de la foi où les chrétiens étaient privés de

pastorale » ( Directoire sur la piété et la liturgie populaires) . En ce sens, il convient

de mettre en valeur l’importance des signes chrétiens qui imprègnent la culture de secteurs populaires qui apportent à des millions de personnes une sensibilité favorable à Dieu et produisent une transmission spontanée de la spiritualité chrétienne. Cette religiosité chère aux pauvres s’est transformée souvent en un chemin utilisé par L’Esprit pour atteindre le cœur et commencer le retour de beaucoup de ceux qui se sont éloignés, à une vie d’amitié avec Dieu. Dans d’autres cas il s’est produit une silencieuse mais ferme adhésion à la foi chrétienne offrant un sentiment d’identité et d’appartenance.

 

Dans cette transmission, le peuple n’est pas une masse anonyme et passive mais un sujet actif. Durant longtemps on n’a pas reconnu que la majorité du peuple pauvre comme sujet culturel. Pour cette raison la religiosité latino-américaine à partir de préjugés supposés qui dévalorisait le peuple, a été considérée comme quelque chose d’archaïque, fétichiste propre à des ignorants. Dans les manifestations les plus authentiques de la piété populaire, de fait, le message chrétien assimile pour une part les modes d’expression de la culture du peuple, et pour une autre part, communique les contenus évangéliques selon la conception de ce peuple sur la vie, la mort, la liberté, la mission et le destin de l’homme. Ainsi la transmission des pères aux fils, d’une génération à l’autre des expressions culturelles apporte la transmission des principes chrétiens. Dans certains cas la transmission est si profonde qu’elle apporte des éléments propres à la foi chrétienne. Dans quelques cas l’union est si profonde que des éléments propres de la foi chrétienne se sont transformés en composants de l’identité culturel d’un peuple. Comme exemple on peut prendre la piété envers la Mère du Seigneur. (Répertoire sur la piété populaire et la liturgie. 63). Aparecida va jusqu’à parler de « mystique populaire » (nº 262).

 

 

 

 

L'Église est confrontée à plusieurs défis. Aujourd'hui plus que jamais on trouve sur le tapis, lorsqu'il s'agit de proposer une œuvre évangélisatrice, le thème de la vie. C'est clairement dans la conscience de toute l'Église que l'enjeu de la vie et de là "la vie en abondance" que Jésus-Christ nous apporte. D'où la nécessité de concentrer dans cette perspective tous les efforts. Aparecida met sous nos yeux la réalité d'une culture de la mort, dont certains les signes les plus évidents sont : l’augmentation de la pauvreté et de l’extrême pauvreté, la concentration des richesses, le manque d’équité, loi du marché, le néolibéralisme, les paradis de la finance, la crise de la démocratie, la corruption, l’immigration, la discrimination sociale, le terrorisme, la pollution de l'environnement, la crise familiale, l’avortement, l’euthanasie, le subjectivisme, le consumérisme, l’imposition de la culture moderne et le mépris des cultures ancestrales, l’individualisme, la crise des valeurs, le relativisme moral, la distanciation entre la foi et la vie.

C'est une dure constatation pour l'Église qu'après avoir animé la vie et culture latino-américaine pendant plus de cinq siècles, le sens religieux du peuple s’est érodé (DA 38), la foi ne se transmet pas de génération en génération avec la même fluidité (DA 39). Aparecida, loin de se morfondre dans le regret ou la condamnation de la situation, reconnaît humblement qu’elle n'a pas les réponses aux problèmes et que c'est une invitation à discerner à la lumière du Saint-Esprit pour se mettre au service du Royaume dans cette réalité.(DA 33).

Il est imprescriptible "que le zèle missionnaire nous consume pour porter au cœur

de la culture de notre temps, ce sens unitaire et complet de la vie humaine que ni la science, ni la politique, ni l'économie, ni les médias peuvent fournir. Dans la Parole du Christ, Sagesse de Dieu, la culture peut retrouver son centre et sa profondeur, d'où l’on puisse regarder la réalité dans l'ensemble de tous leurs facteurs, les discernant à la lumière de l'Évangile et donnant à chacun sa place et sa dimension adéquate » (DA 41). Les disciples missionnaires sont appelés à être créatifs

dans les domaines de la culture, de la politique, de l'opinion publique, des arts et des sciences, endroits qui ont été fréquemment abandonnés. « En assumant avec une force nouvelle cette option pour les pauvres » (399). Evangéliser la culture loin d’abandonner l’option préférentielle pour les pauvres » la renouvelle. (DA 397, 398, 399).  Le compromis avec la réalité naît de l’amour passionné du Christ qui accompagne le peuple de Dieu dans la mission d’inculturer l’Evangile dans l’histoire avec une charité samaritaine ardente et infatigable.

L’Eglise pour assumer le grand projet du Règne, selon le style de Jésus devra rénover les modes d’approche, d’interaction, et redécouvrir dans la culture existante les points d’ancrage.

L’évangélisation de l’actuelle culture post moderne réclame dans l’intérieure de l’Eglise et en en dehors d’elle un travail pastoral qui prenne en compte la parole, les actions, les signes et les symboles, un imaginairequi exprime l’option de la vérité sur Dieu et sur l’homme. (gras dans le texte)

 

 

 

Cela implique la création d'un nouveau paradigme culturel , comme une vraie alternative à la pensée unique dominante, qui tienne compte des principales préoccupations et des pôles d'intérêt des hommes d'aujourd'hui: réalité sociale, la pensée

écologique, la cosmologie moderne, les ethnies, la paix, l’éthique de l’attention, la miséricorde et la compassion.

 

 

 

La piété populaire, dans cette recherche, recueille les d'affirmations les plus importantes qu'Aparecida nous offre, un chemin privilégié . Elle est pour le peuple latino-américain l’expression de la foi catholique, elle contient la dimension la plus précieuse de la Culture latino-américaine, elle pénètre délicatement l’existence personnelle de chaque fidèle et bien qu'elle soit vécue par une foule, elle peut être approfondie et pénétrer à chaque fois mieux le mode de vie de nos peuples, et être un imprescriptible point de départ essentiel pour faire en sorte que la foi du peuple murisse et devienne plus féconde, contienne et exprime un sentiment intense de la transcendance, une capacité spontanée à s'appuyer sur Dieu et une véritable expérience d'amour théologal ; c'est une manière légitime de vivre la foi, expression de la sagesse surnaturelle, une façon de se sentir membre de l'Église et une manière

d'être missionnaires, c'est une puissante confession du Dieu vivant qui agit dans l'histoire et un canal de transmission de la foi. (Aparecida 258, 259, 261, 262, 263, 264). (gras dans le texte)

 

 

 

La religiosité à partir de ses différentes expressions si vivantes et significatives peut venir au secours de l'homme, de son identité et de sa vocation à la vie. En elle, selon les mots du Pape "apparaît l'âme des peuples latino-américains", est "le précieux trésor de l’Eglise Catholique en Amérique latine" et « reflète une soif de Dieu que seuls les pauvres et les humbles peuvent savoir ». Le peuple humble a généré et transmis à travers les manifestations de plusieurs siècles ce que sont les moyens dont il dispose pour célébrer la vie. La religiosité populaire a des espaces d'expression particulière de la foi dans les sanctuaires  dispersés à travers l'Amérique latine et les Caraïbes. Le sanctuaire tient dans l'histoire de la foi chrétienne en Amérique un rôle prépondérant. Il serait très difficile pour l'Église d’établir une approche des grands groupes humains qui s'identifient à la foi

catholique - bien qu'ils ne le fassent pas toujours de manière expressive formelle - sans la présence et l’action pastorale des sanctuaires. Par leur piété, les gens simples vont au sanctuaire et se souvient que son origine est dans le Seigneur et aussi que le Dieu qui nous a aimé ne cesse jamais de nous aimer et qu'aujourd'hui, au moment précis de l'histoire où on se trouve, face aux contradictions et aux souffrances du présent, Il accompagne le chemin de la vie. Tout comme l'Ancien et le Nouveau Testament en témoignent de façon unanime, le Temple est le lieu de mémoire d'un passé salvifique et de l'atmosphère de l’expérience actuelle de la grâce.

 

 

 

Le sanctuaire est le signe de la présence divine, le lieu de l'actualisation toujours

nouvelle de l'alliance des hommes avec l'Éternel et entre-eux. En allant au sanctuaire, l'Israélite pieux redécouvrait la fidélité du Dieu de la promesse dans chaque "aujourd'hui" de l'histoire. Le temple est la demeure sainte de l'Arche de l'alliance, le lieu où s’actualise le pacte avec le Dieu vivant et où le peuple de Dieu prend conscience de constituer la communauté des croyants, " lignée choisie, sacerdoce royal, nation sainte" (1 Pierre 2,9). Le sanctuaire est le lieu de l'Esprit, car c'est le lieu où la fidélité de Dieu atteint les hommes et les transforme. On va d'abord au sanctuaire pour invoquer et accueillir la grâce de l'Esprit, et pour le porter en toutes les actions de la vie. Le sanctuaire est, par excellence, le lieu de Parole, lieu privilégié de pardon, de réconciliation et d'action de grâce. En lui, le fidèle à travers les sacrements, réalise la rencontre des vivants avec Celui qui donne continuellement et nourrit d'une vie toujours nouvelle, dans la consolation et l'espérance, ceux qui viennent

 

 

 

affamés et assoiffés. Au sanctuaire on arrive comme le temple du Dieu vivant, le lieu de l’alliance vivante avec Lui, afin que la grâce des sacrements libère les pèlerins du péché et leur donne la force de recommencer avec une nouvelle vigueur et une nouvelle joie dans cœur, pour être des témoins transparents de l'Éternel parmi les hommes. Cette fidélité de Dieu provoque des alliances qui sont les «promesses» du pèlerin.

Dans le sanctuaire, on apprend à ouvrir le cœur de tous, en particulier à ceux qui sont différents de nous: l'invité, l'étranger, l'immigrant, le réfugié, celui qui professe une autre religion et le non-croyant. Ainsi, le sanctuaire, en plus de se présenter comme un espace de l'expérience de l'Église, devient un lieu de convocation ouvert à toute l'humanité.

"L'expérience de la piété populaire constitue une manière particulière d'approcher

un peuple humble, souvent éloigné des formes plus traditionnelles de pastorale.

Cela se transforme en une possibilité de communiquer l'Evangile, exprimé, vécu et

contextualisé dans le symbolisme et le rythme propres à la réalité du peuple croyant ». (Déclaration finale du IVe Congrès des recteurs de sanctuaires d'Amérique latine et de la Caraïbe)

Le pèlerinage est une autre expression de la religiosité populaire liée au sanctuaire.

Il possède une expression symbolique profonde qui manifeste profondément les recherches humaines de sens et de rencontre de l'autre dans l'expérience de la plénitude, de celui qui nous transcende et qui est au-delà de toute possibilité, de différence et de temps. Le pèlerinage permet l'expérience de la recherche et de l’ouverture ; on se socialise en marchant avec les autres pèlerins et on réchauffe son cœur, avec des sentiments de profonde solidarité.

La fête occupe une autre place importante, elle apparaît comme la clôture, l'accomplissement, de la gratitude mêlée à la joie, au chant et à la danse. A la fête tous les sens du corps interviennent dans un climat de joie et de bonheur. Le temps est réglé par un rythme alternatif de concentration et d’inactivité, actes religieux et actes profanes. Ce n'est pas une mise en scène avec spectateurs et rotagonistes. Même les spectateurs se transforment en protagonistes. La présence des autres, même celle des inconnus, intensifie le caractère de ce qui est célébré, car les célébrants se sentent obligés de montrer ce qui est célébré. La fête identifie également le peuple, car la célébration rassemble tous les voisins, ceux qui ont migré, et en attire même de nouveaux.

La dévotion mariale fortement enracinée dans la foi de notre peuple constitue

l'un des principaux signes d'identité, tout comme l'alliance avec Yahvé pour Israël.

Israël était conscient d’être le peuple élu, dépositaire de la loi et des prophètes. Par ses relations avec un Dieu proche, il était conscient de son caractère unique. Par analogie, le peuple chrétien saisit que la protection de Dieu lui vient de l'invocation d'une image de Marie, personnalisée et singulière, et que par cela, Marie personnalise et particularise ce peuple.

Le peuple se sent identifié par l'image de Marie, car leurs parents sont allés vers elle et eux viennent à elle aujourd'hui dans leurs problèmes. Admirer les vertus personnelles de Marie, la piété populaire se prévaut de ses attributs pour atteindre Dieu. L'action miraculeuse de Marie est le signe principal d'une protection individualisée dans un lieu et à partir d’un lieu. La supplication et la demande de faveurs sont une manifestation de l'alliance

 

 

 

 

 

 

mère-fils, de relations interpersonnelles, et d’engagement mutuel. Même s’il s’agit de personnes manquant de pratique sacramentelle, elles réagissent à la maladie ou à la souffrance en faisant une promesse. On peut marcher jusqu'au sanctuaire, faire la route en silence, faire le tour du sanctuaire à genoux, les bras en croix, portez des cierges ou faire des dons ; mais la plupart des promesses restent anonymes et les motivations restent anonymes dans l’intimité de la personne ou de la famille.

 

 

 

Dans les manifestations de piété populaire mariales, on peut sentir la loi de l’Incarnation. L'inculturation de la foi ne signifie pas seulement que la foi se conforme à des moules culturels préexistants, mais que la foi crée des signes d'identité et des moules de convivialité sociale, qu’elle les exprime, les remplit de vie et exprime la vie. " Les gens sont comme l’eau. Son cours est comme celui des rivières, qui inévitablement pélerine. Parfois comme les rivières de montagne, ils tombent verticalement et impétueusement vers la vallée. D’autres fois, comme nos rivières pampéennes, dociles et pépères et «velléitaires», par des détours ludiques, finissent dans l'océan. D'autres fois, enfin, comme notre Paraná, qui borde San Nicolás, qui, quand il est bas, est apparemment calme, mais qui cache en lui la force d'un torrent insoupçonnable. Le peuple est comme l'eau des fleuves qui pèlerine, il se jette toujours dans l'océan. Pourquoi les pèlerins et pas seulement ceux qui errent, ont-ils leur propre direction et leur propre objectif ?  Venant de la montagne ils vont vers l'océan ; venant de Haut, ils se dirigent vers l'Infini. Être une rivière, être un peuple, c'est précisément avoir la conscience d’une origine commune et le pressentiment de se donner un destin commun. Et cette conviction est renforcée dans les peuples quand, les gouttes d'eau se mélangent, par la foi chrétienne, avec le sang du Christ. Parce que le sang, c'est-à-dire la vie, celle du Christ et, dans le Christ, la nôtre, vient d'une Origine et, d'un pèlerinage à travers la mort, qui débouche dans la résurrection. Telle est la foi de notre peuple. Mais un peuple croyant qui pérégrine sur cette terre, qui est eau et sang, est toujours torrent. Torrent de rivière, torrent de sang. Torrent qui montre sa vitalité, dans la force avec laquelle il cherche la vérité, dans la force de son amour et avec lequel il embrasse ses idéaux. Toutes ces forces sont régulièrement concentrées dans la passion et l’imaginaire.

 

 

 

Le torrent est l’imaginaire du peuple qui emporte avec lui tout ce qu'il trouve et ce qu’il invente, mélangeant tout à l’aveugleL’imaginaire est invention. L’imaginaire du peuple n'est pas seulement la capacité d’inventer des histoires, mais aussi la capacité de trouver la vérité. Des vérités qui sont au-delà des contes, des anecdotes, des légendes ; noyaux vraiment substantiels de vérité revêtus de décors exubérants liés à la tendance ludique elle-mêrme de l’imaginaire. Le naître et le mourir, la rencontre de l’homme et de la femme, l’amour et la solitude, le travail et la maladie, le fait de faire le bien et de conduire au mal posent la question de la vérité que renferme la vie sous forme d’énigme et de mystère. On est tenté de donner des réponses sous formes d’intuitions divinatoires. Dès l’instant où la vie renferme

en elle quelque chose de divin, la vie devient une énigme. Dans sa recherche pressante de la vérité, le peuple teste la vérité en avançant dans l’imaginaire. Pour cela, il lui est plus facile d’accepter la parole de vérité que Dieu lui révèle dans le Christ. Et en même temps, il continuera à entourer la vérité révélée de l’exubérance de son imaginaire. (Le peuple est comme l'eau. Écrits théologiques pastoraux de Lucio Gera).

La proposition d'Aparecida est un appel à vivre ce moment de notre histoire

comme événement salvifique et ecclésial. Dans cette lumière, la mission de l'Église se

 

 

 

 

 

 

présente comme l'effort inlassable d'unir dans un seul message le transcendant avec l’immanent, l'éternel avec le quotidien, et en cela, la religiosité populaire comme une expression vraie et sensible de la foi, née à l'ombre de nombreuses douleurs, a beaucoup à nous dire. "La plus grande noblesse des hommes est d’élever leur travail au milieu de la dévastation, la maintenant infatigablement, à mi-chemin entre les larmes et la beauté »( Ernesto Sabato Avant la fin. Souvenirs). Les hommes, depuis l'Ancien Testament jusqu’à aujourd'hui, en chaque moment de l'histoire quand nous éprouvons le sentiment d'échec total et de chute, nous avons été sauvés par la partie la plus faible de l'humanité. La mission de L'Église se présente comme un service à la vie pleine, digne et heureuse dans Christ et ne peut se passer du peuple pauvre et humble qui, au milieu des difficultés de chaque jour, a essayé d'incarner cette proposition .

En tant que Peuple pèlerin de Dieu d’Amérique latine et des Caraïbes,

nous confions les disciples missionnaires à la tendresse, à la beauté et à la joie de l’amour de Dieu manifesté dans le visage métis de la Mère de Dieu, de la Vierge de Guadalupe. Elle conduit son peuple par la pupille de ses yeux et le protège au creux de son manteau. Ses mains jointes dans la supplication, nous encouragent à jeter les filets pour que tous s’approchent de Jésus, "le Chemin, la Vérité et la Vie" (Jn 14,6), parce qu'Il veut que chacun "ait la vie et l'ait en abondance" (Jn 10,10).

 

 

 

19 janvier 2008

Cardinal Jorge Mario Bergoglio 

 



02/07/2023
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