LA DISSIMULATION DES SOURCES DE LA THEOLOGIE DU PAPE - 3
La dissimulation des sources de la théologie du pape - 3
Le dernier livre que nous lisons sur le sujet, El Papa Francisco y la teologia del Pueblo de Rafael Luciani est aussi muet que les autres. Bardé de diplômes, l’auteur disserte à partir des milliers de pages écrites ces trente dernières années. Mais cette accumulation n'apporte rien que l'on ne sache déjà sinon un patos invraisemblable.
Dans le pamphlet de Lucio Gera, (Apuntes para una interpretacion de la Iglesia argentina-1970) contre l'Eglise argentine, (page 21), il est seulement mentionné « on peut affirmer que cependant aujourd'hui une grande partie du peuple s'identifie politiquement au péronisme ». Plus loin il est question, page 73 et suivantes, du peuple de Dieu qui comprend tout le monde clerc et laïcs, mais on ne sort pas de la « dénonciation prophétique à partir d'une lecture socio-politique de l'Evangile et d'un désir sincère de servir le peuple » (page 78). Nous sommes toujours dans le schéma classique de théologie de la libération. Dans la conclusion l’auteur demande une définition du peuple de Dieu. « L'Eglise de son côté doit discerner quelle doit être son action libératrice à partir de la perspective du Peuple et de ses intérêts et l'orienter vers le Peuple et à partir du Peuple ».
C'est le charabia des prêtres du Tiers-Monde, l'aile révolutionnaire du clergé argentin à laquelle appartient Lucio Gera depuis 1968. Une possible source péroniste est complètement oblitérée.
1 - La théologie du peuple argentin s'enracine en réalité dans le péronisme. Pour ne pas l’avouer, on occulte l'imprégnation du mot PEUPLE dans l'inconscient politique et religieux des Argentins. Le cas du jeune Bergoglio est sous ce rapport étonnant.
Plusieurs de ses biographes rapportent qu'à la fin de ses études secondaires, 16/17 ans, une de ses professeurs lui donne à lire « La Razon de mi vida » de Evita Peron. Nous sommes en 1951/52. Juan Peron est au pouvoir depuis 1946.
La femme de Juan Peron vit ses derniers mois. Elle est l'idole du peuple et son livre va être distribué gratuitement dans toute l'Argentine.
(Nous n'ignorons pas que certains ont prétendu qu'elle ne l'avait pas écrit. Nous prétendons le contraire car c'est le même style que celui de ses discours et de ses écrits dans les bulletins et les revues du parti.)
Ce livre est une déclaration d'amour à son mari et au peuple argentin, amours qui, d'ailleurs, se confondent.
Le mot « PEUPLE » figure 229 fois dans un livre de 150 pages. (Nous n'avons pas lu de traductions françaises).
Le mot est employé une dizaines de fois au pluriel, mais le plus souvent on lit « mi pueblo ».
Le mot « peuple » est une source d'exaltation inouïe. Elle voudrait, alors qu'elle est atteinte d'un cancer, que son épitaphe soit rédigée ainsi ; « Il y eut au côté de Peron une femme qui s'est consacrée à porter au Président les espérances du peuple que lui, Peron, a converti en réalités. De cette femme nous savons seulement que le peuple l'appelait affectueusement, Evita »
Sans cette source il n'y aurait jamais eu de « théologie du peuple ». Il fallait pour que le peuple argentin avale la couleuvre libérationniste lui servir dans un brouet qui en masquerait la réalité.
Mais ce livre est aussi une déclaration de guerre contre les riches, les exploiteurs, les impérialistes, les marxistes et les communistes. Evita veut une révolution. « La race des oligarques exploiteurs de l'homme disparaîtra en ce siècle, dans le sang ou non ! » (Page 106).
2 – Pour montrer la filiation qui existe entre le péronisme et le père Bergoglio nous produisons ici une suite de citations qui nous paraissent éloquentes. (Les références sont celles de l’édition argentine de 2009)
« La lumière vient uniquement du peuple p 23
« Il est nécessaire que les peuples comme les hommes favorisent leur propre destin p27
« Comme je l’ai pensé, un jour il sera nécessaire de faire une révolution, le peuple l’a senti – il le sent !-le moment crucial de son histoire est arrivé p 29
« Je veux voir comme voit et sent le peuple p 40
« Pour moi un « descamisado » c’est celui qui se sent peuple p 60 ; (« sans chemise » nom donné aux militants les plus pauvres.)
« Ils sont partie intégrante du peuple ; de ce peuple dont la cause a gagné mon coeur depuis de nombreuses années p 61
« Je veux maintenant expliquer comment je sers les « humbles » p 77
« La douleur des humbles (El dolor de los humildes). Titre d’un sous-chapitre du livre p 80
« Pour faire ce travail (aide sociale), j’ai choisi des hommes et des femmes humbles p 87
« Cela ne peut être autrement. « Seuls les humbles sauvent les humbles ». Peron l’a toujours dit p 88 et p141
« De tout ce que j’ai fait de bien dans ma vie « je l’ai fait en recevant les humbles descamisados de mon peuple » p 90
« Ce que j’ai fait pour les gens humbles de ma Patrie n’est rien d’autre que la justice p 92
« Je suis émue de la gratitude des humbles plus que par aucune autre chose p 93
« Dieu est plus le Dieu des pauvres que des riches p 104
« Je lutte contre tout privilège du pouvoir ou de l’argent p 107
« La vraie lumière c’est le christianisme humaniste de la doctrine de Peron p 113
« La solution sera seulement la justice sociale… Je sais que le monde a besoin d’une pluie de justice
p 199
« Le peuple me paie de son affection p 121
« Que pouvais-je faire, moi une humble fille du peuple … ? p 131 p 151
« Je sais que ma solution est plus une porte qu’un chemin p 138
« Les femmes comprennent mieux la douleur des humbles p 148
« Je me sens véritablement la mère de mon peuple p 153
« Tôt ou tard viendra un jour nouveau pour l’humanité : le jour du Justicialisme p 154
On comprend pourquoi le préfacier du livre écrit « Nuestra Santa Evita ».
Par ces citations nous voulons simplement montrer que le courant péroniste porté par Juan Peron et Evita Peron a imprégné jusqu’aux moelles le peuple argentin. Qu’il lui a donné une « forma mentis » politique et sociale qui ne s’est jamais effacée et à laquelle le jeune Bergoglio a adhéré intimement. Il portait le badge du péronisme. A l’âge des responsabilités, il retrouvera dans ce modèle des éléments structurants qui marqueront le provincial des jésuites, l’archevêque de Buenos Aires et le pape François.
La théologie de la libération a trouvé un enracinement et un masque dans l’histoire argentine. On juge l’arbre à ses fruits. Or que voit-on ?
La théologie du peuple, celle du pape, donne les fruits dont la révolution libérationniste a toujours rêvé. Ceux qui soutiennent le pape François sont ceux qui ont appelé à la révolution dans l’Eglise, leur cri de ralliement est le même dans le monde entier : « Une autre Eglise est possible » ! « Otra Iglesia e posible » !
Cette autre Eglise nous la voyons naître chaque jour !
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