« Il y a à peine un mois qu’elle a une obligation de quitter le territoire national. Les choses se sont faites dans des conditions malheureusement imprévisibles. » Quatre jours après l’ignoble meurtre de la petite Lola, Gérald Darmanin daigne enfin prendre la parole. Mais au micro de RTL, loin de reconnaître les manquements et la responsabilité de l’État, le ministre de l’Intérieur fait le choix de mentir.
Une Algérienne en situation irrégulière
Était-ce vraiment « imprévisible » ? La réponse est sans appel : non. Dhabia B., principale suspecte, n’aurait jamais dû être en France, ce vendredi 14 octobre, jour de la mort de Lola. La jeune femme de 24 ans, d’origine algérienne, faisait l’objet d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF), non pas depuis « à peine un mois », comme le laisse entendre Gérald Darmanin, mais depuis le 21 août. Ce jour-là, de passage à l’aéroport d’Orly, la suspecte qui cherche à rejoindre la zone des vols internationaux est interpellée par la police aux frontières qui contrôle l’irrégularité de sa situation et en informe les services du ministère de l’Intérieur. Ceux-ci lui délivrent alors une OQTF. Autrement dit, depuis le 21 août, la jeune femme disposait d’un délai de 30 jours pour quitter le territoire français. Malheureusement, comme 88% des OQTF, celle de Dhabia B. n’a jamais été exécutée. Et ce, alors même qu’Emmanuel Macron promettait, en 2020, d’appliquer 100 % des OQTF. Encore une promesse en l’air…
Les étudiants étrangers, une filière d’immigration
Le cas de Dhabia B. est emblématique du laxisme migratoire français et de ses conséquences dramatiques. Comme le rappelle Gérald Darmanin au micro de RTL, « elle est arrivée régulièrement en tant qu’étudiante sur le territoire national ». En effet, la jeune femme, à l’instar de près de 90.000 étudiants étrangers chaque année – essentiellement originaires du Maroc et de l’Algérie –, a profité de la filière légale des visas étudiants pour venir s’installer en France. En 2016, elle s’inscrit dans une formation de CAP de restauration, selon une information Europe 1, et obtient ainsi un visa de séjour. Seulement, trois ans plus tard, en 2019, le préfet du Val-de-Marne aurait refusé « le renouvellement de son titre de séjour étudiant », précise Amaury Bucco, journaliste pour CNews. Cela fait donc trois ans que la suspecte est présente sur le territoire national en situation irrégulière. Une information que Gérald Darmanin omet de préciser…
Comme Dhabia B., des dizaines de milliers de jeunes, principalement issus du Maghreb et de l’Afrique subsaharienne, profitent du visa étudiant pour débarquer en France de façon régulière et s’y installer durablement en toute illégalité. En effet, pour obtenir un visa étudiant, il n’est pas nécessaire de justifier d’un certain niveau d’excellence. Peu importe la formation suivie, seule une inscription (ou une préinscription) dans « un établissement public ou privé d’enseignement supérieur » ou « dans un organisme de formation professionnelle supérieure » est nécessaire pour obtenir une carte de séjour. Au bout de deux ou quatre ans, le visa étudiant périme et ces jeunes doivent – en théorie - retourner dans leur pays d’origine, faute d’embauche en France. Si plusieurs mesures ont été prises en 2008 pour s’assurer de l’assiduité et du sérieux des étudiants étrangers, des dérives subsistent encore. En 2012, un rapport officiel du Réseau européen des migrations alertait ainsi sur le « détournement du statut étudiant à des fins migratoires ».
Alors que le séjour irrégulier ne constitue plus un délit depuis près de dix ans, il devient difficile pour les forces de l’ordre d’appréhender ces clandestins entrés légalement sur le sol français. Si seulement l’État prenait au sérieux la question migratoire, le meurtre de Lola n'aurait jamais eu lieu.
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