Le Terrorisme pastoral

Le Terrorisme pastoral

Comment Benoît XVI a censuré son successeur III

 

 

 

 

 

 

Sensus fideli et sensus Fidelium

 

 

Pour bien comprendre ce que représente la réponse de la Commission théologique internationale, nous avons cherché si elle avait eu des échos. Nous avons trouvé une étude de 19 pages, de madame Ysabel de Andia, docteur en théologie et en philosophie et membre de l’Académie pontificale de théologie. Son étude est parue dans la Nouvelle revue de théologie (142-2 ; 2020). Elle prend comme point de départ de sa longue étude, « Le flair du troupeau : sensu Eccesiae, sensu fideli et sentire cum ecclesia », la lettre du pape François au Peuple de Dieu qui est en marche en Allemagne du 29 juin 2019.

 

Voici le texte de Y. de A :

 

Introduction : sensus fideli et sensus Ecclesiae

Le pape François, dans sa Lettre au peuple de Dieu qui est en marche en Allemagne1 (29 juin 2019) – ce titre adopte une formule inspirée d’Ignace d’Antioche qui souligne l’aspect « pérégrinant » de l’Église et par conséquent sa « synodalité » – développe l’idée d’un « sensus Ecclesiae » : « Il s’agit de vivre et de ressentir avec l’Église et dans l’Église, ce qui nous amènera à souffrir dans l’Église et avec l’Église. » Nul ne peut avoir le « sens de l’Église » s’il ne vit pas dans l’Église, dans une communauté vivante, s’il ne vit pas de l’Église, de ses sacrements et de sa liturgie, s’il ne vit pas avec l’Église les événements qui font son histoire.

Et pour cela, ajoute le Saint-Père, « il faut nous immerger dans les sources de la tradition la plus vivante » : le sens de l’Église suppose l’immersion dans la tradition qui seule trace la continuité depuis les apôtres jusqu’à l’aujourd’hui et ouvre un avenir en continuité avec le passé et le présent. Et de citer Gustav Mahler : « La tradition est la sauvegarde de l’avenir et non la conservation des cendres ».

 

Notre première observation sur cette introduction, concerne la dernière phrase et la citation du pape qui figure bien au deuxième paragraphe de la partie 9 de la Lettre.

Il n’y a pas de traduction officielle en français de la Lettre nous suivons la traduction espagnole qui dit : « … la Tradition a pour mission de maintenir le feu vif plus que de conserver les cendres… » une note renvoie à l’auteur : Gustav Malher. La note donne un autre texte : « la tradition est la sauvegarde du futur et non la conservation des cendres ». Cette formulation a été employée dans un autre cas par le pape.

 

La version allemande du texte de la Lettre est conforme à la version espagnole : « : Das Feuer am Leben zu erhalten statt, ledigliche die Asche zu bewahden ».

Là est le problème. Aucune de ces versions n’est la bonne. Les Allemands ne semblent pas avoir demandé une rectification au responsable du texte officiel qui n’avait sans doute jamais lu Malher et s’est contenté de croire sur parole les deux textes contenus dans la lettre du pape. La formule retenue par Madame Y. de Andia est celle de la note.

Heureusement, Yves Daoudal, étonné de la sentence « reprise » par le pape, a donné la version authentique de Mahler dans son bulletin du 19 novembre 2019 : « Tradition ist die Weitergabe des Feuers und nicht die Anbetung der Asche » : ce qui se traduit par : « La tradition est la transmission du feu et non la conservation des cendres ».

Nous avions déjà remarqué que le pape sollicitait à contresens un texte de Romano Guardini, qu’il interprétait Benoît XVI, mais là, il fait très fort… et personne ne dit rien ni les Allemands ni la docteure de l’Académie pontificale.

 

Il est vrai que l’étude de celle-ci, bourrée de références, se permet de drôles d’écarts.

Voulant nous dire que le pape avait cogité cette affaire du sensus fidei depuis longtemps alors qu’il était archevêque de Buenos Aires, elle cite un texte qu’elle dit être de 1982.

Patatras ! Le texte est du 18 février 1974. C’est une instruction pour l’ouverture de l’Assemblée provinciale des Jésuites, 1982 étant la date de l’édition où se trouve le texte ! Elle ne donne pas non plus la référence dans le Denzinger  – là encore, « inventée » en 1974 par le père Bergoglio!

 

Alors pourquoi a-t elle « raccroché » son étude à la Lettre au peuple allemand ?

Pour nous la raison est simple : dans la Lettre le pape expose ce que doit être la nouvelle Eglise Il emploie la formule, Sensus Ecclesiae quatre fois : trois fois dans la partie 9 et une fois dans la partie 11.

Mais ce Sensus Ecclesiae n’est pas celui que nous entendons c’est-à-dire celui que nous recevons du magister universel de l’Eglise. C’est le Sensus Ecclesiae de l’Eglise en marche !

Tel est le sujet de la Lettre ! Elle reprend tous les poncifs des autres textes pontificaux : Nous sommes conscients que nous vivons seulement un temps de changements mais aussi dans un changement de temps qui qui réveille de nouvelles et anciennes questions qu’il est juste nécessaire d’affronter. »

Pour affronter cette situation, vos pasteurs ont suggéré un chemin synodalEn substance il s’agit d’un synode sous la conduite de l’Esprit Saint, c’est à dire, cheminer ensemble et discerner avec toute l’Eglise sous sa lumière, comme guide et irruption pour apprendre à écouter et discerner l’horizon toujours nouveau qu’il veut bien nous offrir. Parce que la synodalité suppose et requière l’irruption de l’Esprit Saint ».

Ce festival de platitude est illustré par la désignation obligatoire des ennemis de ce programme qui sont les habituels Pelagiens et autres « réduction idéologique et manipulatrice », sans oublier les « promoteurs du gnosticisme ».

« La synodalité, avec le tréfond et la centralité de l’évangélisation et le Sensus Eccleclsiae comme éléments déterminants de notre ADN ecclésial, réclame d’assumer consciemment un mode d’être l’Eglise où « le tout et plus que la partie et aussi plus que la simple somme de ces parties ».

Nous voici ramenés aux quatre principes dont le pape ne nous a toujours pas dit d’où ils venaient ! Nous avons même droit à un « argentinisme » avec le mot  « gaseoso », limonade : traduit en allemand par , « gasförmiges » c’est-à-dire « gazeux ».

L’esprit mondain conduit « à un corps ecclésial bien organisé et même modernisé mais sans âme ni nouveauté évangélique ; nous vivrions un christianisme « gazeux sans morsure évangélique. »

L’étude de la docteure Yzabel n’a pas pour but de nous communiquer l’enseignement de l’Eglise sur le sensus fideli ou le sensus fidelium, mais d’adapter ces notions traditionnelles à la nouvelle Eglise du pape Bergoglio, nouvelle Eglise élaborée par le modernisme revu et corrigé façon théologie du peuple.

 

Un dernier point le pape utilise dans sa démonstration dans la partie 12, la Kenosis, (l’humanité du Christ).

Le site Gloria.tv a relevé en son temps la condamnation de Pie XII sur l’utilisation erronée qui est faite dans la Lettre :

 « J’ai toujours été impressionné de voir comment le Seigneur est entré en tentation d’une façon particulière pendant sa vie terrestre, particulièrement dans les instants de grandes décisions. (Original : « wie der Herr in besonderer Weise versucht wurde ») …La prière et le jeûne avaient une importance particulière et déterminante pour toute son action qui suivait. (cf. Mt 4,1-11) De même, la synodalité ne peut se soustraire à cette logique et doit toujours être accompagnée de la grâce de pouvoir s’amender, afin que nos actions personnelles et communes s’adaptent toujours plus à la Kénose du Christ et qu’ils puissent la représenter (cf. Phil 2,1-11). Parler, agir et répondre en tant que corps du Christ, cela signifie aussi parler et agir à la façon du Christ avec les mêmes attitudes, la même circonspection et les mêmes priorités. Et en suivant l’exemple du maître qui  « s'est dépouillé lui-même, en prenant une forme d’esclave » (Phil 2,7) la grâce de pouvoir s’amender nous libère de protagonismes faux et stériles… »

 

Pie XII a clairement pris position face à cette idée d’une Kénose du Christ :

Dans son encyclique Sempiternus rex Christus il y répond en 1951:

« Il existe un autre ennemi de la profession de foi de Chalcédoine, largement répandu en dehors de l’Eglise catholique : Il s’agit d’une opinion basée sur une citation de l’épitre de Saint Paul aux Corinthiens, mal et arbitrairement interprétée. C’est la doctrine de la Kénose, selon laquelle on admet une limitation de la Divinité du Verbe.

Cette invention est vraiment un sacrilège qui doit être condamnée, ensemble avec l’erreur opposé du docétisme et qui réduit tout le mystère de l’Incarnation et de la Rédemption en une ombre vaine et sans corps. « C’est dans la nature parfaite et entière de l’homme – ainsi nous enseigne Léon Ier le Grand - vrai Dieu par sa naissance, qu’il a pris la nature parfaitement complète d'un homme authentique et il est : tout entier dans la sienne et tout entier dans la nôtre... » 

 

En décrivant le Christ, Notre Seigneur, par la notion de Kénose, le pape François change la profession de foi de Chalcédoine, la doctrine de l’Eglise catholique sur la Trinité.

Et c’est pour appuyer cette hérésie qu’il nous présente Jésus Christ comme un homme qui entre en tentation et qui doit lutter contre des tentations. Ce qui ne correspond pas au Nouveau Testament. »

 

 

Trois conclusions s’imposent :

 

1 Le synode allemand comme le synode amazonien réalisera en plusieurs étapes ses objectifs radicaux. Hier, 20 avril, le président de la Conférence des évêques allemands, Mgr Georg Bätzing, évêque de Limburg a déclaré que l’Eglise devait absolument changer l’enseignement officiel sur pratiques les homosexuelles. Il a lancer cette réclamation le jour de Pâques dans le Frankfurter Allgemeine Sonntagzeitung.

 

  1. de Andia se fonde pour son étude, sur une annonce de synode dont on savait par sa radicalité qu’il était déjà une rupture avec l’enseignement de l’Eglise.

 

2 La lettre du pape Bergoglio est un modèle de modernisme pour illettrés. La pauvreté du style et du vocabulaire. Le rabâchage des clichés de la théologie du peuple ne constitue pas une parole d’avenir pour l’Eglise allemande ni pour l’Eglise universelle. Désigner comme ennemis les pélagiens et les gnostiques est une forme grossière qui renvoie à des adversaires fantomatiques puisque les personnes visées dans leur grande majorité ne comprennent pas le sens de ces invectives gratuites.

 

3 Madame Yzabel de Andia confirme ce que nous savions déjà. A côté du premier cercle des cardinaux, évêques et religieux connus, véritables « groopies » du pape, il existe une pléthore d’universitaires, de journalistes et d’écrivains de tous ordres qui relaient tout et n’importe quoi pour soutenir la révolution dans l’Eglise.

 

 

A suivre : Le pape Benoît XVI a censuré son  successeur, IV

 

 



21/04/2020
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